Mars Surveyor 98

La mission Mars Surveyor 98 a pour thème principal l'eau et tourne autour de trois points importants : l'eau en tant qu'élément indispensable pour l'apparition de la vie telle que nous la connaissons, l'eau dans le climat martien et l'eau en tant que ressource essentielle pour les futures missions habitées à destination de la planète rouge.

Un des plus grands mystères que la planète rouge nous offre concerne l'existence de l'eau. On trouve à la surface de Mars des traces d'érosion fluviale qui attestent que l'eau a un jour existé à l'état liquide sur cette planète. Aujourd'hui pourtant, Mars est une planète sèche et aride. L'eau liquide ne peut plus exister à sa surface, car la pression atmosphérique et les températures sont bien trop basses et l'atmosphère martienne ne contient plus qu'une petite quantité de vapeur d'eau. Que sont donc devenues les formidables réserves d'eau martiennes ? Y a-t-il encore de l'eau dans les calottes polaires. Se cache-t-elle sous forme de glace dans le sous sol martien ? A moins que les précieuses molécules se soient échappées dans l'espace et que tout espoir soit perdu d'en trouver encore en grande quantité sur la planète rouge. L'histoire climatique de Mars ne nous a-t-elle laissé que des déserts ? C'est la une des questions auquel Mars Surveyor 98 devra répondre.

L'eau a également un impact sensible pour la recherche d'une éventuelle vie martienne. La sélection de sites d'atterrissage intéressants du point de vue de l'exobiologie (par exemple pour les missions de retour d'échantillons) tourne autour de régions qui ont connu (ou qui connaissent encore) l'eau à l'état liquide : anciens aquifères souterrains (anciens réservoirs d'eau situés sous la surface), anciennes étendues d'eau en surface comme les lacs ou un océan (des traces de vie pourraient être conservées dans des sédiments lacustres ou marins), environnements hydrothermaux encore actifs (existence d'eau liquide chauffée par des résurgences de magma).

Mars Surveyor 98 comprend deux sondes, un orbiteur (Mars Climate Orbiter) et un atterrisseur (Mars Polar Lander), et cela pour un coût sensiblement identique à celui de la mission Pathfinder (265 millions de dollars). Ensemble, elles vont cartographier la surface martienne, déterminer la structure de l'atmosphère, étudier son interaction avec la surface et rechercher des traces d'eau et de glace en surface et dans le sous sol martien.

Mars Climate Orbiter

Objectifs

Après sa mise en orbite autour de la planète rouge et pour une durée de trois mois, Mars Climate Orbiter va supporter les activités de la sonde Mars Polar Lander et servir en particulier de relais radio entre la Terre et l'atterrisseur. A la fin de la mission de celui ci (février 2000), elle pourra véritablement s'attaquer à ses principaux objectifs : l'étude de la distribution de l'eau sur Mars et du climat (passé et présent) de la planète rouge.

Mars Climate Orbiter va observer le climat martien depuis une orbite presque polaire à une altitude de 400 km d'altitude. Elle devra en particulier étudier la composition des matériaux de surface, les nuages de l'atmosphère ainsi que les voiles de poussières, la distribution de la vapeur d'eau et de l'ozone, les systèmes météorologiques (comme les cellules de hautes et de basses pressions, les fronts, les tourbillons de sable, les jets streams), le transport de la poussière et de l'eau autour de la planète, l'origine des tempêtes de poussières (locales, régionales ou globales) et leur mouvement,  l'érosion éolienne et les éventuels changements de la surface martienne. La sonde tentera aussi de découvrir le passé climatique de Mars, de localiser les réservoirs des volatils (eau et CO2) et de caractériser les effets topographiques qui influent sur la circulation de l'air et le réchauffement thermique par les rayons du Soleil. Les observations seront réalisées sur différentes échelles de temps : sur une période d'une journée, d'une saison ou d'une année.

La mission

Mars Climate Orbiter a décollé un jour après l'ouverture de sa fenêtre de lancement, le 11 décembre 1998 à bord d'une fusée Delta II 7425. La sonde ne pesait que 629 kg lors du lancement. Le voyage vers Mars va durer 9 mois, et sera ponctué par quatre manœuvres de correction de trajectoire.

L'insertion en orbite martienne est prévue pour le 23 septembre 1999. A ce moment, le moteur de la sonde s'allumera pendant 16 à 17 minutes pour placer l'engin sur une orbite elliptique d'une période de 12 à 17 heures. Cette insertion en orbite sera suivie par 140 jours de freinage atmosphérique. La sonde Mars Climate Orbiter va cependant commencer son freinage avec une orbite beaucoup plus basse que celle de Global Surveyor (1/3 de la période de Global Surveyor), et la phase de freinage atmosphérique durera donc moins longtemps. Comme le lancement de la sonde a eu lieu au début de la fenêtre de lancement, elle devrait atteindre son orbite finale deux semaines au moins avant l'arrivée de sa compagne (Mars Polar Lander).

La phase de cartographie durera 687 jours (soit une année martienne), du mois de mars 2000 jusqu'au mois de janvier 2002. L'altitude de l'orbite de cartographie sera de 412 km pour une révolution de 2 heures, et l'orbite sera presque polaire. Le passage au dessus de l'équateur aura lieu à 4:30 PM heure locale. Une fois la phase de cartographie terminée, la sonde servira de relais de communication pour les missions futures pendant encore trois ans.

Les instruments scientifiques

  • Le PMIRR (Pressure Modulator Infrared Radiometer) : Cet instrument est une nouvelle version du radiomètre emporté par la sonde Mars Observer. C'est un module météorologique complet. Il va permettre d'observer la distribution globale et les variations dans le temps de la pression, de la température, de la poussière, de la vapeur d'eau et des nuages dans l'atmosphère mais aussi de quantifier l'émission radiative de surface et l'ensoleillement. Sa résolution verticale sera de 5 kilomètres/pixel et il travaillera avec 9 longueurs d'ondes différentes (une dans le visible et huit autres bandes de 6 à 50 micromètres dans le domaine de l'infrarouge). L'instrument sera capable d'observer la totalité de la planète, y compris le limbe, à l'exception des régions polaires. Un petit miroir lui permet en fait d'observer l'atmosphère depuis la surface jusqu'à 80 km d'altitude. Pour la première fois, les bandes d'adsorption du gaz carbonique et de la vapeur d'eau seront étudiées avec une résolution verticale de 5 kilomètres. Un radiateur gardera les détecteurs situés dans le plan focal de l'instrument à une température de - 193°C.
  • Le MARCI (Mars Surveyor Color Imager) : Cet instrument combine deux caméras (une à grand angle, l'autre à angle moyen), le système électronique d'acquisition de données et l'alimentation en énergie. C'est une version miniature de la caméra de Mars Global Surveyor (elle est environ vingt fois moins lourde). A la fin de la phase de croisière, le système MARCI prendra des images de Mars. Une fois la sonde sur son orbite de cartographie, la caméra grand angle fournira des vues journalières et globales de l'atmosphère et de la surface de Mars. Quant à la caméra à angle moyen, elle permettra de surveiller la surface de Mars et de détecter d'éventuels changements. La caméra grand angle peut fonctionner dans sept bandes spectrales différentes (5 bandes dans le visible de 425 à 750 nanomètres, 2 bandes UV à 250 et 330 nanomètres). Sa résolution spatiale varie de 7,2 km/pixel pour des débits faibles de transmission de données, à 1 kilomètre lorsque le débit s'y prête. Des observations du limbe de la planète permettront l'étude de la structure atmosphérique des nuages et des brouillards avec une résolution de 4 kilomètres. La caméra à angle moyen fonctionne dans 8 bandes spectrales différentes, du violet au proche infrarouge (de 425 à 930 nanomètres). Sa résolution spatiale est de 40 mètres par pixel et chaque vue couvre 40 kilomètres de coté. La caméra pourra photographier n'importe quel endroit de la planète à l'exception des pôles (à cause de la légère inclinaison de la sonde).
  • Enfin, Mars Climate Orbiter emporte avec elle un relais radio pour relayer les communications des futures stations au sol (américaines ou internationales) et supporter les activités de la sonde Mars Polar Lander.

Mars Polar Lander

Objectifs

Lors de sa descente vers la surface martienne, Mars Polar Lander va commencer par prendre des images de la région polaire sud. Une fois au sol, il photographiera le site d'atterrissage dans différentes longueurs d'ondes de manière à déterminer la nature et la composition des matériaux de surface. Il creusera des tranchées dans le sol martien pour rechercher des enregistrements superficiels des changements climatiques de Mars (visibles sous la forme de dépôts stratifiés). Il procédera à des analyses de sol pour mettre en évidence la présence d'eau et de glace. Des mesures météorologiques seront également au programme (vents, température, pression et vapeur d'eau, détection de nuages de glace, formation et disparition du givre et de la neige à la surface). Il sera ainsi capable de caractériser les processus physiques qui interviennent dans les cycles saisonniers de l'eau, du CO2 et de la poussière sur Mars.

La mission

La sonde Mars Polar Lander s'est envolée comme prévu le 3 janvier 1999, dés le premier jour de sa fenêtre de lancement, à bord d'une fusée Delta II 7425. Au moment du lancement, la sonde pesait 576 kg, contre 290 kg une fois à la surface de Mars.

Avant son départ, Mars Polar Lander a subi une stérilisation identique à celle effectuée sur les sondes Viking. Pendant son développement, la sonde a été continuellement nettoyée à l'éthanol. Certaines parties de la sonde ont été stérilisés par chauffage (50 heures à 110°C). La qualité de la stérilisation est contrôlée par des tests micro biologiques (prélèvement, incubation et comptage). Une inspection finale a été réalisée juste avant son encapsulation dans le bouclier thermique (à ce moment là, le nombre de spores par m2 doit être inférieur à 300) et avant son intégration avec le lanceur (moins de 300 000 spores au total).

Le voyage vers Mars va durer 11 mois. Pendant le vol, 5 manœuvres de correction de trajectoire auront lieu. La première, la plus importante en durée, doit être exécutée 15 jours après le départ. La sonde sera suivie par les antennes du Deep Space Network, et en particulier par celles de 70 mètres de diamètre, qui autorisent des débits de données plus importants que les antennes de 34 mètres de diamètre.

Les antennes du Deep Space Network traqueront la sonde Mars Climate Orbiter juste avant et après l'acquisition de l'atterrisseur. Le suivi simultané des deux sondes permettra d'augmenter la précision lors des manœuvres d'approche, de descente et d'atterrissage. La sonde Mars Global Surveyor pourra également être utilisé comme aide à la navigation.

L'atterrissage aura lieu le 3 décembre 1999. Après une entrée atmosphérique directe, Mars Polar Lander sera ralenti par un système hérité de Mars Pathfinder (bouclier thermique et parachute de 8,4 mètres de diamètre déployé par un petit mortier), et la sonde atterrira en douceur grâce à l'utilisation de petites fusées. Les pieds de l'atterrisseur toucheront la surface de Mars à proximité de la calotte polaire sud, entre 72° et 78 ° de latitude Sud et 130° à 190° de longitude Est, au niveau des fameux dépôts stratifiés. Comme les anneaux de croissance des troncs d'arbre, les terrains stratifiées conservent l'histoire climatique de Mars. Mars a-t-elle connu des modifications catastrophiques de son climat, des changements épisodiques importants ou une évolution plus graduelle ? Mars Polar Lander devra répondre à ces questions.

Le site d'atterrissage n'est pas encore déterminé avec précision. La sonde Mars Global Surveyor a déjà obtenu des images intéressantes et des données altimétriques d'une zone située un peu plus prés du pôle sud que le site d'atterrissage optimal. D'autres images seront obtenues en juin 1999 pendant la phase de cartographie de Global Surveyor. Le choix d'un site sera possible jusqu'en août 1999, moins de quatre mois avant l'arrivée du Mars Polar Lander sur la planète rouge. Ce sera en tout cas la première fois qu'une sonde se posera dans les régions polaires de la planète Mars.

Au moment de l'atterrissage, ce sera l'été dans l'hémisphère sud. Ce point est particulièrement important, pour deux raisons. Les terrains qui entourent la calotte polaire sont souvent recouverts par une calotte saisonnière de CO2. La présence de cette calotte empêcherait toute observation. La longitude du site d'atterrissage a donc été choisie en conséquence : la sonde se posera le plus au nord possible, là ou la calotte saisonnière disparaît dés le début de l'été. De plus, en été, le soleil sera toujours au dessus de l'horizon (nous sommes en effet dans les hautes latitudes). Ainsi, pendant les 90 jours de la mission primaire, la sonde ne manquera pas d'énergie solaire et l'insolation sera maximale.

La mission primaire de Mars Polar Lander devrait se terminer le 29 février 2000. C'est sans aucun doute la durée de vie des batteries (nickel/hydrogène) qui déterminera la durée de vie de l'atterrisseur. Pendant la nuit, les batteries doivent maintenir les composants électroniques de l'atterrisseur à une température relativement clémente (- 30°C tout de même !), si on la compare à la température qui régnera alors à l'extérieur (- 80°C). Lorsque la batterie sera déchargée, plus rien ne protégera la sonde du froid et de l'obscurité des longues nuits martiennes, ni du retour de la calotte saisonnière. Mars Polar Lander finira alors gelé.

Le déroulement de l'atterrissage

Les préparatifs de l'atterrissage commenceront 14 heures avant l'entrée atmosphérique. A 7 heures et 25 minutes avant l'entrée, un suivi de la sonde sera réalisé pendant 30 minutes grâce aux antennes du Deep Space Network. Si une manœuvre de correction de trajectoire est nécessaire, les instructions seront envoyées à ce moment là à l'atterrisseur. Cette manœuvre devra absolument être exécutée 7 heures avant l'entrée. 5 heures avant l'entrée, une session d'une durée totale de 1 heure commencera. Il s'agira alors de contrôler les différents systèmes de la sonde et de vérifier le résultat de la manœuvre de correction de trajectoire, si celle ci a eu lieu. A 4 heures et 30 minutes, une valve explosive sera mise à feu pour pressuriser les moteurs des rétrofusées. Le dernier contact avec la sonde aura lieu 25 minutes avant l'entrée et durera jusqu'à 15 minutes. Pendant cette session, les équipes au sol recevront le statut du système de propulsion. 15 minutes avant l'entrée, le logiciel commandant la caméra de descente est initialisé et cinq minutes après, ce sera au tour de la plate-forme de navigation inertielle. Cette plate-forme comporte des gyroscopes et des accéléromètres qui renseigneront la sonde sur sa vitesse, sa position et sa trajectoire. Le tableau ci-dessous détaille la suite des événements :

Événements Temps avant l'atterrissage
Initialisation du système de guidage inertiel (altitude : 4600 km, vitesse 5700 m/s) L - 15 min (soit 10 minutes avant l'entrée atmosphérique)
La sonde se positionne pour l'entrée atmosphérique (allumage des propulseurs pendant 80 secondes) (altitude : 3000 km, vitesse : 5900 m/s) L - 12 min
Séparation de l'étage de croisière et éjection des pénétrateurs 18 secondes plus tard (altitude : 2300 km, vitesse : 6200 m/s) L - 10 min
Entrée atmosphérique (altitude : 125 km, vitesse : 6900 m/s) L - 5 min
Déploiement du parachute (altitude : 8800 m, vitesse : 490 m/s) L - 2 min
Ejection du bouclier thermique et allumage de la caméra de descente (altitude : 7500 m, vitesse : 250 m/s) La première image est obtenue 0,3 secondes avant l'éjection du bouclier. La caméra prendra 10 images en tout. L - 110 s
Déploiement des pieds de l'atterrisseur. Acquisition de la surface par le radar embarqué (altitude : 2500 m, vitesse : 85 m/s) L - 50 s
Éjection de la coiffe de protection supérieure, séparation de l'atterrisseur et allumage des rétrofusées (altitude : 1800 m, vitesse : 80 m/s) L - 35 s
Atterrissage (vitesse : 2,4 m/s) L - 0 s
Déploiement des panneaux solaires et des instruments scientifiques L + 20 minutes

Juste après l'atterrissage, l'horloge de l'ordinateur de bord qui était passée à 20 MHz une minute avant l'entrée atmosphérique, passe à 10 Mhz, histoire d'économiser de la puissance. 60 secondes après, la caméra de descente est désactivée. Après avoir attendu quelques minutes que la poussière soulevée par l'atterrissage retombe au sol, les panneaux solaires sont déployés (il serait assez embêtant qu'ils soient recouverts de poussière dès l'arrivée de la sonde). L'antenne à moyen gain est alors tournée vers la Terre, le gyroscope détermine la position du nord avant d'être désactivé, et la caméra effectue un scan vertical avant que le déploiement de son mât. 20 minutes après l'atterrissage, Mars Polar Lander envoie vers la Terre un rapport complet sur son état, ainsi que les données des accéléromètres recueillies pendant l'entrée, la descente et l'atterrissage, des données météorologiques et peut être même les premières images de la caméra de descente. Les informations seront recueillies par une antenne de 70 mètres du Deep Space Network. Une fois cette session terminée, l'atterrisseur utilisera son antenne faible gain pour écouter la réponse. 2 heures après l'atterrissage, la première communication à haut débit entre l'atterrisseur (antenne UHF) et la sonde Mars Climate Orbiter aura lieu (transmission des données télémétriques et météorologiques, des images de la caméra de descente et de la caméra panoramique).

Les activités le jour de l'atterrissage (Sol 0, puisque nous allons nous référer aux jours martiens plutôt qu'aux jours terrestres pour suivre le déroulement de la mission) dépendront de l'état de l'atterrisseur. Suivant la charge des batteries, le débit des panneaux solaires, l'inclinaison de l'atterrisseur et les températures à bord, Mars Polar Lander pourra soit commencer ses expériences, soit être placé dans un mode de veille ou soit se préparer pour un petit somme. Les premières opérations scientifiques comprendront un test du bras articulé, un statut du TEGA, des observations avec le LIDAR et l'acquisition d'images supplémentaires par la caméra panoramique et la caméra miniature du bras robotique. Enfin, le mât météorologique continuera à fournir des indications sur les températures, les pressions et la teneur en CO2 et en vapeur d'eau de l'atmosphère.

Pendant la nuit, l'activité de l'atterrisseur sera réduite au minimum, mais l'ordinateur de bord ainsi que le mât météorologique seront activés de temps en temps. Nous l'avons déjà dit, pendant la période primaire de la mission de l'atterrisseur, le soleil ne se couchera jamais. Le package météorologique se mettra en marche pendant quelques minutes pour effectuer des relevés de pressions et de températures à 9:00 PM, 1:00 AM et 5:00 AM. A chaque fois, l'antenne UHF enverra les données à l'orbiter. Le LIDAR sera aussi activé pendant la nuit martienne. La journée martienne commence officiellement à 9:00 AM.

Les instruments scientifiques

On trouve dans un premier temps le MVACS (Mars Volatiles and Climate Surveyor) qui se compose lui même d'un certain nombre d'instruments :

  • Un système d'imagerie stéréo de surface (SSI ou Stereo Surface Imager) : Cette caméra panoramique est montée au sommet d'un mat de 1,5 mètres de haut. Elle est identique à la caméra utilisée par Pathfinder. Grâce à sa capacité multispectrale, du violet au proche infrarouge (400 à 1000 nm) et à la présence d'un système de calibration, les images obtenues seront en "vraies couleurs". Ce système fournira des images panoramiques, permettra de caractériser l'environnement du site d'atterrissage et interagira également avec d'autres expériences (TEGA, bras robotique, photographies des plaques magnétiques). En observant le Soleil, elle pourra aussi étudier les aérosols et la vapeur d'eau atmosphérique.
  • Bras robotique (RA ou Robotic Arm) avec caméra intégrée (RAC ou Robotic Arm Camera) : L'atterrisseur possède un bras articulé de deux mètres de long, avec une extrémité articulée sur laquelle est fixée une pelle, une petite caméra et un capteur de température. Ce bras permettra de creuser des tranchées, de manière à prélever des échantillons de sols. La caméra permettra d'observer une éventuelle stratification (la résolution atteindra le millimètre) du sol et du sous sol et sera à même de caractériser la texture des échantillons prélevés avec le bras. Elle permettra aussi d'observer les profils du sol sur les côtés des tranchées. Le capteur de température mesurera la température ambiante et la conductivité thermique du sol.
  • Package météorologique (MET ou Meteorological Package) : Il est monté sur un bras de 1,2 mètres de longueur et permettra de réaliser des mesures sur les vents (vitesse et direction) et les températures (4 capteurs). Un système de diodes lasers (tunable diode laser, ou TDL) va également permettre de mesurer la quantité de vapeur d'eau présente dans l'atmosphère et de déterminer la présence d'isotopes spécifiques de l'eau (Deutérium/Hydrogène et 18O/16O) et du CO2 (13C/12C et 18O/16O). Ces isotopes sont des indicateurs précieux si l'on veut comprendre l'évolution de l'atmosphère de Mars. Un mât secondaire de 0,9 mètres de long est attaché sous l'atterrisseur. Il va servir à mesurer la vitesse du vent et la température (grâce à deux capteurs) entre 10 et 15 cm au dessus de la surface martienne. Les capteurs de pression sont montés à l'intérieur de l'atterrisseur. Le package météorologique recueillera également les données provenant des thermocouples montés sur le bras robotique. Le MET nous fournira les premières données météorologiques acquises depuis la surface de l'hémisphère sud ainsi que les premières données météo de la région du pôle sud.
  • TEGA (Thermal and Evolved Gas Analyzer) : Cet instrument extraordinaire va permettre de détecter de l'eau et du CO2 dans des échantillons de sols. Le bras robotique commence par creuser une petite tranchée de quelques centimètres dans le sol. Un échantillon est prélevé, photographié par la caméra du bras robotique puis déposé dans l'un des fours de l'un des 8 analyseurs du TEGA. Une diode LED servira à confirmer qu'un échantillon de sol a bien été délivré. Le sol est ensuite chauffée à basse température (27°C) et le bras robotique, pendant ce temps, retourne dans la tranchée pour mesurer la température à même le sol. Avant de poursuivre les opérations, on laisse le sol refroidir pendant la nuit. Le lendemain matin, il est porté à très haute température (1027°C). Il est possible d'obtenir une température aussi importante avec une alimentation en énergie assurée uniquement par les panneaux solaires de l'atterrisseur, car la masse de l'échantillon à chauffer est très faible (0,1 gramme). Lors du chauffage progressif, le sol va libérer de l'eau et du CO2, ainsi que diverses substances volatiles emprisonnées dans différents minéraux. L'identification des substances volatiles s'effectue grâce à une petite diode laser. Un faisceau laser va passer à travers les gaz émis par l'échantillon. Chaque molécule va absorber de manière spécifique une certaine quantité de lumière laser. Une fois utilisé, le four ne peut plus servir. Le TEGA va aussi jouer le rôle d'un calorimètre. Chacun des huit analyseurs comporte en fait deux fours en céramique. Lors d'une analyse, l'un des fours restera vide alors que l'autre sera rempli avec l'échantillon de sol. Après chauffage, en mesurant la chaleur qui s'échappe du four vide et en la soustrayant à celle qui s'échappe du four plein, nous pourrons obtenir une valeur précise de la quantité de chaleur absorbée par le sol. En tout, le TEGA pourra donc analyser 8 échantillons de sol.

Puis d'autres instruments comme :

  • Le LIDAR (Light Detection and Ranging) : Cet instrument se trouve au dessus du corps de l'atterrisseur et va servir à étudier les aérosols atmosphériques ainsi que les nuages de glace. C'est le premier instrument russe (fourni par l'IKI) qui sera utilisé sur une sonde planétaire américaine. Son fonctionnement est un peu similaire à celui du radar. Il émet des pulses d'énergie et détecte leur écho lorsqu'elles sont réfléchies par différents obstacles. Contrairement au radar, le LIDAR n'émet pas d'ondes radio, mais des pulses de lumière laser (2500 pulses de lumière dans le proche infrarouge chaque seconde). Il se compose d'un senseur, d'un dispositif électronique et d'un câble d'interconnexion. Une diode laser enverra des flashs lumineux dont le retour sera chronométré de manière à localiser et à caractériser les nuages de glace et la poussière dans l'atmosphère martienne sur une courte distance (2 à 3 kilomètres). L'objectif principal de cet instrument est de déterminer la quantité de poussière en suspension dans l'atmosphère au dessus du site d'atterrissage. Le LIDAR inclut également un microphone.
  • Le microphone : Monté avec le LIDAR, il n'a pas nécessité de réajustements au niveau de la masse, de la puissance, du volume ou du débit de données de la sonde. Il pèse moins de 50 grammes et ses dimensions ne dépassent pas 5 cm sur 5 cm. On pourrait penser de prime abord que cet instrument n'est qu'un gadget, mais il n'en est rien ! Pour que l'on puisse entendre des sons, il faut que ceux ci se propagent dans un milieu, comme l'air. Il existe deux différences importantes entre l'atmosphère martienne et terrestre :  la pression atmosphérique et la composition. La pression atmosphérique de Mars est très faible (0,1 % de la pression terrestre). Or il se trouve que le niveau sonore diminue avec la pression. Cependant, l'atmosphère martienne semble assez dense pour permettre la propagation d'un signal acoustique dans un domaine de fréquence audible. Nous devrions donc être en mesure d'entendre quelque chose, grâce aux amplificateurs présents avec le microphone. Du point de vue de la composition, l'atmosphère martienne est principalement constituée de CO2 (contrairement à l'atmosphère terrestre). Cette différence ne devrait cependant pas empêcher la propagation des sons. Le petit instrument va peut être nous permettre d'entendre le souffle du vent, le bruit des tourbillons de sable, le rugissement des tempêtes de poussières et pourquoi pas des éclairs ! Il nous transmettra également les bruits en provenance de l'atterrisseur, comme celui du bras robotique en train de creuser le sol (dans un premier temps, la durée de chaque son sera de 10 secondes). Mais le son le plus excitant sera sans doute celui dont nous n'avons pas idée ! L'expérience a démontré qu'à chaque fois qu'un nouvel instrument est envoyé dans l'espace, il nous apprend quelque chose de nouveau sur l'environnement extraterrestre. C'est la que réside le véritable intérêt de ce microphone.
  • Le MARDI (Mars Surveyor Descent Imager) : C'est une caméra de descente située sous l'atterrisseur. Elle commencera à prendre des images juste avant l'éjection du bouclier thermique (l'altitude sera alors inférieure à 8 km) et continuera ainsi jusqu'à l'atterrissage. La première image montrera une zone carrée de 9km sur 9 km avec une résolution de 7,5 mètres/pixel, alors que la dernière image montrera une zone de 9 mètres sur 9 mètres avec une résolution de 9 mm/pixel. La caméra va acquérir 10 images au total. Le capteur CCD de cette caméra va fournir des images en noir et blanc de 1000 pixels par 1000 pixels. C'est la première fois depuis les missions Apollo que des images vont être prises pendant la descente d'un module.
  • Un lien UHF permet de communiquer avec la sonde Mars Climate Orbiter. L'atterrisseur peut également envoyer des données à la sonde Mars Global Surveyor, mais ne peut pas recevoir de commandes. Enfin, l'atterrisseur peut communiquer directement avec la Terre (dans les deux sens) via son antenne à gain moyen (bande X). Si une antenne de 70 mètres du Deep Space Network est utilisée, le débit est de 5700 bps. Pour une antenne de 34 mètres, le débit tombe à 1400 bps. L'utilisation d'un orbiter permet de porter le débit à 128 000 bps. Chaque jour, l'atterrisseur aura 3 ou 4 opportunités pour échanger des informations avec les sondes en orbite. La session ne peut cependant commencer que lorsque l'orbiteur est à 20° au moins au dessus de l'horizon martien.
  • Il emporte enfin les deux pénétrateurs Deep Space 2 du programme New Millennium.

Mars Surveyor 98, une mission dévastée

Le bilan de la mission Mars Surveyor 98 est un véritable désastre sur le plan scientifique, technologique et humain. Le 23 septembre 1999, la NASA perdait définitivement Mars Climate Orbiter à la suite d'une erreur invraisemblable. Suite à cette catastrophe, de nombreux efforts ont été réalisés pour éviter que Mars Polar Lander ne connaisse le même sort. En vain. Le 3 décembre 1999, 15 minutes avant son atterrissage, le contact radio est coupé avec l'atterrisseur polaire. Il ne sera jamais rétabli, malgré de nombreuses tentatives désespérées et la NASA mettra fin aux recherches le 17 janvier 2000. Les pénétrateurs Deep Space 2 s'installeront également dans un silence permanent. La disparition de trois sondes en moins de trois mois va provoquer un véritable séisme à la NASA.

Pour en savoir plus :

Go ! La sonde Mars Polar Lander emporte aussi avec elle les deux pénétrateurs Deep Space 2.
Go ! L'un des aspects importants de Mars Surveyor 98 concerne l'eau sur Mars.
Go ! La perte de Mars Climate Orbiter et de Mars Polar Lander.
Go ! A lire également sur la perte de Mars Polar Lander :
"Une minute de silence pour Mars Polar Lander" et "Un atterrissage et deux enterrements pour Mars Polar Lander".
Go ! Liste de liens concernant Mars Surveyor 98 (page de bibliographie).

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La sonde Mars Climate Orbiter pèse 629 kilogrammes (dont 291 de carburant). On note ici le panneau solaire de 5,5 mètres de long, ainsi que l'antenne grand gain de 1,3 mètres de diamètre. Le moteur principal est situé au dessus, tandis que les instruments sont fixés sur le côté opposé (en bas). L'instrument avec une forme triangulaire en bas à droite n'est autre que le PMIRR. Les petites extensions montées sur les panneaux solaire vont servir à augmenter la surface de celui ci pendant le freinage atmosphérique(Crédit photo : NASA/JPL).

L'orbiter de Mars Surveyor 98

Schéma technique du Mars Climate Orbiter (Crédit photo : NASA/JPL).

Schéma technique de la sonde Mars Climate Orbiter. Cliquez sur l'image pour l'agrandir (Crédit photo : NASA/JPL).

Ejection de l'etage de croisiere

3 décembre 1999 : La sonde Mars Polar Lander se détache de son étage de croisière (notez les panneaux solaires qui ont servi à alimenter la sonde pendant son long voyage). Les deux petits pénétrateurs Deep Space 2 sont largués presque simultanément. Dans un premier temps, Mars Polar Lander perdra de la vitesse par aérofreinage, grâce à un bouclier thermique de 2,4 mètres de diamètre. La température à la surface de ce dernier pourra atteindre 1650°C (Crédit photo : NASA/JPL).

Surveyor 98 : atterrissage

La phase finale de l'atterrissage s'effectue à l'aide d'un parachute et de 12 rétrofusées, alimentées à l'hydrazine. Mars Polar Lander n'utilisera pas un système d'airbags similaire à celui de Pathfinder car la pression atmosphérique du site d'atterrissage est plus faible (à cause de son altitude plus élevée). L'hydrazine est stockée dans deux réservoirs sphériques situés sous les panneaux solaires de l'atterrisseur (Crédit photo : NASA/JPL).

Mars Polar Lander

La sonde Mars Polar Lander sur Mars. On note la caméra sur son mât, le mât météo, les panneaux solaires et l'antenne à moyen gain. Le bras mécanique a déjà creusé plusieurs tranchées dans le sol. Des résidus de la calotte saisonnière de CO2 persistent à la surface (Crédit photo : NASA/JPL).

Lander configuration

Schéma technique du Mars Polar Lander. L'atterrisseur comporte six panneaux solaires. Les quatre principaux sont groupés par paires et situés de part et d'autre. Après l'atterrissage, ils se déploient comme les ailes d'un avion. Deux autres panneaux secondaires sont fixés sur la partie supérieure de l'atterrisseur (Crédit photo : NASA/JPL).

Schéma technique de l'atterrisseur Mars Polar Lander. Cliquez sur l'image pour l'agrandir (Crédit photo : NASA/JPL).

Zone d'atterrissage de Mars Surveyor 98

Cette image montre la région ou doit atterrir la sonde Mars Polar Lander. Les traits blancs représentent les 18 sites d'atterrissage potentiels. La sonde atterrira entre 73° S et 78°S, pour 170° à 230° de longitude. On peut apercevoir la calotte polaire et la frontière des terrains stratifiés (ligne rouge). Les données altimétriques fournies par les sondes Viking (+) et Mariner 9 (X) (lors des occultations radio) ont été corrigées d'après les données récentes provenant de l'altimètre laser de Mars Global Surveyor (points jaunes) (Crédit photo : NASA/JPL).

Tranchées

Cette image a été prise par la caméra de l'atterrisseur de Viking 1. Elle montre la tranchée réalisée par le bras robotique de la sonde dans le sol martien. La profondeur de la tranchée atteint ici 23 cm. Le bras robotique du MVAC creusera des tranchées similaires pour rechercher une éventuelle stratification et la présence de glace dans le sous sol (Crédit photo : NASA/JPL).

TEGA

Le TEGA. Cette petite merveille de technologie va servir à détecter la présence de glace et de CO2 dans le sous sol martien. Des échantillons de sols seront portés à très haute température (1027°C) dans des petits fours en céramique. Ils libéreront alors des gaz qui seront analysés grâce à un faisceau laser. La mise au point de cet instrument a demandé trois ans (Crédit photo : NASA/JPL).

La petite caméra (RAC) du bras articulé (RA) du Mars Polar Lander. Des petites lampes rouges, bleus et vertes permettront d'obtenir des images en couleur du sol martien (Crédit photo : NASA/JPL).

Microphone

Le microphone embarqué avec la sonde Mars Surveyor 98 mesure 5 centimètres de côté et 1 centimètre d'épaisseur. Il pèse environ 50 grammes et consomme moins de 0,1 watt en pleine activité. En plus du microphone proprement dit, on trouve aussi un dispositif pour le stockage des sons. Beaucoup de composants utilisés pour sa construction viennent du commerce. L'ensemble coûte moins de 50 000 $, une bagatelle pour un instrument embarqué dans une sonde spatiale ! (Crédit photo : Planetary Society).

 

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