Feuille de pin de Wollemi (Wollemia nobilis), coupe transversale, détail du limbe (x15)

 

 

Le Pin de Wollemi (Wollemia nobilis) est un conifère aussi remarquable que rare. Appartenant à la famille des Araucariacée, il a été découvert en 1994 dans le parc national de Wollemi en Australie par un garde forestier, David Noble. Bien qu'il soit aujourd'hui possible d'admirer des spécimens dans de nombreux jardins botaniques, la population sauvage actuelle, dont l'emplacement est tenu secret, compterait moins de 100 individus. Cela en fait une espèce très menacée, d'autant plus que la reproduction n'a apparemment plus lieu que de façon végétative. D'un point de vue évolutif, les botanistes considèrent que Wollemia nobilis est un véritable fossile vivant. Il est vrai que les feuilles persistantes de Wollemia, dont il va être question ici, ressemblent étonnamment, du point de vue macroscopique, aux frondes des fougères, alors que l'arbre peut atteindre jusqu'à 40 mètres de hauteur. Observées au microscope, elles dévoilent clairement une structure atypique, particulièrement riche et surprenante, qui rappelle celle des feuilles de l'araucaria du Chili (Araucaria araucana, appelé poétiquement le désespoir du singe) qui seront étudiées sur une autre page.

La coupe transversale présentée ci-dessus a été réalisée dans le limbe d'une seule aiguille plate de Wollemia nobilis. La coloration effectuée est un Etzold FCA : les cellules à parois lignifiées sont colorées en rouge/rose par la fuchsine basique (qui teinte également certains organites cellulaires), celles à parois subérifiées (quand elles existent) apparaissent en jaune/brun grâce à la chrysoïdine, et celles dont les parois sont restées cellulosiques ressortent en bleu grâce au bleu astral (ce colorant ayant également une forte affinité pour les mucilages, comme nous le verrons plus loin).

De la face supérieure vers la face inférieure, on peut distinguer :

  • Un épiderme constitué d'une seule couche cellulaire et percé ici et là de stomates enfoncés. On notera la présence d'une cuticule très épaisse et minéralisée, colorée en jaune pâle par la chrysoïdine.

  • Juste en dessous l'épiderme, on observe un hypoderme entrecoupé par des amas de sclérenchyme formés de fibres aux parois lignifiées très épaisses. De jolies sclérites isolées aux formes irrégulières (parfois étoilées) parsèment également la partie supérieure du mésophylle.

  • Sous le sclérenchyme, un mésophylle hétérogène biface (contrairement au mésophylle homogène du pin et du sapin par exemple), avec dans la partie supérieure de grandes cellules allongées et chlorophylliennes, qui forment un parenchyme palissadique assimilateur, et dans la partie inférieure, un parenchyme lacunaire, constituée de cellules aux formes irrégulières, lâchement connectées les unes aux autres. L'intérieur des cellules du parenchyme palissadique apparaît souvent occupé par une grande vacuole colorée en brun rouge, qui renferme probablement des substances tanniques. Des chloroplastes sont également visibles par endroit. Le parenchyme lacunaire incorpore quant à lui de grandes plages colorées en bleu pâle par le bleu astral. Ces dernières correspondent à des cellules volumineuses (dites compartimentées) ayant sécrétés et accumulés des composés de nature mucilagineuse, ou des espaces intercellulaires remplis par ces derniers. On note également dans les lacunes des petits cristaux rhomboédriques transparents et plutôt esthétiques d'oxalate de calcium.

  • Un faisceau cribro-vasculaire collatéral fermé, situé au centre de la coupe. Il comprend un amas de xylème (flanqué ici et là par des cellules d'un tissu de transfusion) qui surmonte un îlot de phloème, les éléments conducteurs étant par ailleurs entourées par une gaine périvasculaire de cellules arrondies (endoderme). Un renfort de fibres sclérenchymateuses existe parfois au niveau du pôle abaxial des faisceaux (il n'est pas très visible ici). Sur une coupe complète d'une aiguille, tous les faisceaux vasculaires apparaissent parallèles entre eux.

  • Des canaux résinifères arrondis de plus ou moins grandes tailles, bordés par un épithélium sécrétoire et dispersés dans le mésophylle.

  • Un épiderme inférieur (abaxial), lui aussi avec stomates (plus nombreuses qu'au niveau de la face supérieure) et revêtu d'une cuticule un peu plus fine que celle de la face supérieure.

Diagnose sur la coupe : La symétrie bilatérale, ainsi que la forme aplatie de l’organe signent clairement le limbe d'une feuille. La présence de stomates indique un organe aérien. L'épaisseur de la cuticule, ainsi que l'importance du sclérenchyme laissent penser que la plante doit tenter de limiter ses pertes en eau. Les canaux résinifères, très visibles au sein du mésophylle, et qui sont des éléments marquants que l'on retrouve dans les aiguilles ou tiges de pin ou de sapin, pourrait orienter vers une feuille de résineux. Plusieurs éléments atypiques, comme le mésophylle à deux faces, ou les grandes cellules mucilagineuses, peuvent toutefois compliquer la diagnose. Après tout, nous avons affaire ici à un fossile vivant !

 

   
Feuille de pin de Wollemi (Wollemia nobilis), coupe transversale, Etzold FCA (x3) L'image ci-dessus est annotée    

 

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