Les différents types de tissus végétaux
(travail en cours) | version du 25-07-2025

Comme pour les animaux, les plantes supérieures ayant réalisées la conquête du milieu terrestre sont formées de tissus. En biologie, un tissu désigne un ensemble généralement homogène de cellules qui remplissent de manière hautement spécialisée une ou plusieurs fonctions. La science qui étudie les tissus des êtres vivants, le plus souvent par l'intermédiaire d'un microscope, s'appelle l'histologie.

Cette page présente de manière succincte les principaux types de tissus rencontrés dans les coupes histologiques effectuées sur du matériel végétal (racines, tiges, feuilles, graines, etc.). Seront abordés successivement les tissus de revêtements (épidermes et péridermes), les parenchymes, les tissus conducteurs (xylème et phloème), les tissus de soutien (collenchyme et sclérenchyme), les tissus sécréteurs, l'endoderme et enfin les méristèmes.

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La cellule végétale

Les tissus des plantes supérieures qui vont nous intéresser ici étant constituées de cellules, disons quelques mots sur les cellules végétales en guise d'introduction. Tous les êtres vivants sont constitués de cellules, et si ces dernières sont, sauf exception, microscopiques, elles sont pourtant d'une complexité moléculaire absolument faramineuse, à laquelle l'esprit humain n'est guère préparé. La vision que donne le microscope photonique classique d'une cellule, à savoir un petit sac gélatineux avec un noyau à l'intérieur, est affreusement réductrice. Mais rentrer dans le détail de l'ultrastructure cellulaire, telle qu'elle se dévoile par exemple avec un microscope électronique à transmission, nous ferait immédiatement dévier du sujet principal de ce document, et je me contenterai donc d'indiquer que bien qu'étant micrométrique, chaque cellule est en vérité un univers entier de nanomachines aussi remarquables que sophistiquées, et qui agissent pourtant dans la plus grande discrétion, celle qui est propre à l'infiniment petit.

Qu'est ce qui caractérise la cellule végétale ? Sur certains points, les cellules végétales sont semblables aux cellules animales : elles possèdent une membrane qui enclot une sorte de gel hyalin (le cytoplasme), lequel renferme de nombreux organites indispensables à la vie de la cellule, et parmi lesquels on trouve les mitochondries (des sortes de centrales énergétiques avec des rotors moléculaires tournant à des centaines de tours par seconde), des ribosomes (des usines fabricant sur-mesure protéines de structure et enzymes) ou encore le noyau, au sein duquel est conservé le matériel génétique sous la forme d'ADN.

Quand elles sont observées au microscope, les cellules végétales présentent toutefois des spécificités remarquables. Ainsi, elles peuvent renfermer des chloroplastes, organites cellulaires pigmentés en vert capables de réaliser la photosynthèse, mécanisme fondamental pour la vie terrestre et où des éléments aussi simples que de l'eau et du dioxyde de carbone sont transformés grâce à l'énergie lumineuse en molécules organiques. Autre caractéristique plus que notable, les cellules végétales sont enfermées dans une paroi plus ou moins épaisse et complexe, et dont la présence va avoir des conséquences significatives : si la cellule végétale est évidemment bien protégée dans ce caisson, elle ne peut plus bouger, ce qui la prédestine à l'immobilité forcée. De plus, quand la paroi est finalisée, la cellule ne peut plus non plus croître et grandir.

Intéressons-nous un peu plus à cette paroi, car elle est fondamentale sur bien des aspects. Premièrement, c'est surtout elle que l'on colore par différentes techniques quand on prépare des coupes végétales (racines, tiges, feuilles, etc.) en vue d'une observation microscopique. Sur les différentes photomicrographies qui illustrent ce dossier, ce sont surtout des parois de cellules végétales que vous allez voir (même s'il est également possible de distinguer ici et là des chloroplastes ou des noyaux). Assez rapidement, on s'aperçoit que selon les cas, les parois sont plus ou moins épaisses, et qu'elles exhibent des colorations bien différentes.

Dans leur cycle de vie, les cellules végétales commencent par posséder une paroi dite primaire, appelée pecto-cellulosique, en référence à ses constituants principaux. Cette paroi est en effet formée de cellulose (un polymère linéaire de glucose, ce qui fait que la pâte à papier ou le coton de vos t-shirts sont en fait constitués d'un sucre !) et d'hémicellulose (une molécule un peu similaire à la cellulose, mais ramifiée et comportant différents sucres au lieu d'un seul). La cellulose et l'hémicellulose se présentent sous la forme d'un enchevêtrement assez lâche de fibres microscopiques (des fibrilles), ce qui rend la paroi flexible et extensible. Cette paroi primaire est de plus recouverte sur l'extérieur d'une couche de pectine (là encore un polysaccharide). Appelée lamelle moyenne, cette couche a pour fonction principale de coller les différentes cellules entre elles.

Quand la cellule végétale va prendre de l'âge, elle va mettre en place une paroi secondaire sous la paroi primaire (qui sera donc repoussée à l'extérieur). Cette paroi secondaire sera composée de trois couches, au niveau desquelles les fibrilles de cellulose seront cette fois ci disposées selon des directions différentes et très précises (on pourrait dire que la cellule réalise là un véritable tissage au niveau microscopique). Selon le devenir de la cellule, cette paroi secondaire peut rester cellulosique, ou au contraire se voir imprégnée par des composés complexes et imperméables, sortes de goudrons colmatant, et qui peuvent tout à fait selon les cas condamner la cellule à une mort certaine : la lignine (un groupe de molécules phénoliques très complexes que l'on retrouve par exemple dans le bois) ou la subérine (que l'on rencontre dans le liège).

La plupart des colorants employés pour apporter du contraste à des coupes végétales servent à mettre en évidence soit les parois cellulosiques, soit les parois lignifiées ou subérifiées. Comme nous allons le voir, le type de paroi qu'une cellule végétale va posséder va jouer un rôle essentiel dans sa ou ses fonctions. Ainsi, les propriétés exceptionnelles du matériau bois s'expliquent non seulement par sa structure en tant que tissu (ensemble de cellules), mais également par les caractéristiques structurelles, mécaniques et chimiques des parois cellulaires individuelles.

Les tissus protecteurs

Les épidermes

Tissu de revêtement par excellence, le rôle des épidermes est de protéger un organe donné (tige, feuille, fruit) des menaces du milieu extérieur, qui peuvent prendre plusieurs formes. La perte d'eau (dessiccation) est l'une des plus critiques pour les plantes, mais il faut en compter d'autres, comme les agressions purement physiques (froid et chaleur, rayonnement solaire), la prédation mécanique causées par les mandibules des insectes et la mâchoire des herbivores, le danger provoqué par des agents chimiques (pesticides), celui présenté par les spores de champignon toujours présentes dans l'air, etc.

Pour jouer leur rôle protecteur, les plantes mettent en place au niveau des épidermes des cellules jointives, serrées les unes contre les autres. En ne présentant aucun interstice, elles font ainsi mécaniquement barrage à ce qui vient du milieu extérieur. Dans bien des cas, si les parois latérales et internes des cellules épidermiques restent pecto-cellulosiques, la paroi externe est cutinisée, c'est à dire enrichie en cutine (un polymère complexe d'esters d'acides gras à longues chaînes, imperméable à l'eau). De plus, les épidermes sont aussi souvent recouverts d'une cuticule, une couche imperméable plus ou moins épaisse, composé là encore de cutine, mais qui englobe aussi des cires. Ces dernières sont composés d'esters d'acides gras et d'alcools là aussi à longues chaînes carbonées, et sont par conséquent très hydrophobes. La cuticule s'interrompt au niveau des stomates, sans quoi les échanges gazeux seraient impossibles. Loin d'être une simple couche passive, la cuticule se montre capable de réagir aux variations de l'humidité ambiante. Quand l'air est chargée d'eau, le réseau de cutine se relâche, ce qui sépare les plaquettes microscopiques de cires, et dégage des espaces où l'eau peut passer. Au contraire, lorsque l'humidité est faible, le réseau de cutine se resserre et rapproche les plaquettes de cires, d'où une augmentation de l'imperméabilité.

 
Coupe transversale assez fine d'une feuille d'iris (Iris magnifica) montrant l'épiderme. Ce dernier, qui constitue la première barrière avec le milieu extérieur, apparaît ici clairement constitué d'une seule file de petites cellules cuboïdes. On distingue un stomate à gauche, avec ses deux cellules de garde. Etzold FCA (x40) L'image ci-dessus est annotée L'épiderme d'une feuille de lin de Nouvelle-Zélande (Phormium tenax), ici vu en coupe transversale montre une cuticule très épaisse, possédant au moins deux couches. La cuticule est particulièrement développée chez les espèces xérophytes (plantes adaptées à des milieux caractérisés par une sécheresse marquée). Etzold FCA (x40) L'image ci-dessus est annotée  
 
  Feuille de chanvre (Cannabis sativa), coupe transversale montrant un poil épidermique cystolithique caractéristique, Wacker (x35) L'image ci-dessus est annotée Feuille de figuier à caoutchouc (Ficus elastica), coupe transversale, cystolithe (carbonate de calcium) et pédicelle silicifié, Etzold FCA (x40) L'image ci-dessus est annotée
   
Pétale de jacinthe (Hyacinthus), coupe transversale montrant les cellules épidermiques productrices d'essence, Etzold FCA (x20) L'image ci-dessus est annotée    

Les épidermes des organes aériens (feuilles et parfois tiges) portent également des stomates, grâce auxquels les échanges gazeux sont rendus possibles (eau sous forme vapeur, dioxyde de carbone et oxygène). Les stomates sont composés de deux cellules réniformes (en forme de haricot ou de rein), riches en chloroplastes (à l'exception des ptéridophytes, ce sont les seules cellules chlorophylliennes des épidermes) et qui se font face, en ménageant une ouverture appelée ostiole. Selon les conditions (par exemple selon le jour ou la nuit), les deux cellules stomatiques, appelées cellules de garde, vont ouvrir ou fermer l'ostiole. Le mécanisme précis du fonctionnement des stomates n'est pas encore parfaitement connu, mais il implique une rentrée ou une sortie d'eau des cellules de garde depuis les cellules annexes qui les entourent. Lorsque de l'eau quitte les cellules de garde, celles-ci se dégonflent et les deux parois latérales contiguës (qui sont lignifiées) se touchent alors étroitement en fermant l'ostiole. Au contraire, lorsque l'eau rentre, les cellules de garde deviennent turgescentes, se déforment en croissant (les parois contiguës lignifiées ne changeant pas de forme), ce qui ouvre l'ostiole. Dans les faits, le mécanique d'ouverture/fermeture est plus compliqué qu'un simple flux d'eau, et des échanges d'ions (en particulier potassium) sont impliqués. Chaque stomate communique avec un espace lacunaire sous-jacent, appelé chambre stomatique. Suivant les espèces, les stomates sont surtout concentrés au niveau de la face inférieure des feuilles, mais peuvent aussi se rencontrent aussi bien au niveau inférieur que supérieur. D'un point de vue évolutif, les stomates sont apparus pour la première fois sur le sporophyte des mousses. Elles sont évidemment absentes au niveau des organes souterrains et des organes immergés des plantes aquatiques (chez ces dernières, l'épiderme a principalement pour fonction l'absorption passive de l'eau, des sels minéraux et des gaz, le milieu aqueux se chargeant du rôle de protection).

Si les stomates contrôlent les échanges d'oxygène (O2) et de dioxyde de carbone (CO2), elles sont également le siège de la transpiration, c'est à dire de la fuite d'eau sous la forme de vapeur dans l'atmosphère. Cette transpiration, ou évapotranspiration, qui a lieu principalement au niveau des feuilles permet à une plante de réguler son contenu hydrique, mais elle peut aussi s'avérer dangereuse si elle est trop forte, ou au contraire si elle est absente. Effectivement, quand la transpiration est trop importante, et si les pertes d'eau ne peuvent pas être compensées par l'absorption des racines, la plante va se dessécher. Inversement, la transpiration fournit une aspiration cruciale (ou un appel) au niveau du xylème, en permettant à la sève brute d'y circuler, en plus de l'apport fourni naturellement par les forces de capillarité. En l'absence de transpiration, le moteur principal de la circulation de la sève brute est par définition coupé. L'endoderme des racines peut toutefois pallier à cette situation particulière en fournissant une pression racinaire.

L'épiderme supporte enfin également souvent un ensemble de poils épidermiques (trichomes), qui peuvent être soit à rôle protecteur (poils tecteurs) ou sécréteur (poils glandulaires).

En plus des cellules épithéliales classiques, les épidermes peuvent aussi inclure des cellules spécialisées, comme les grandes cellules bulliformes que l'on retrouve dans la feuille de maïs ou celle de l'Oyat, et qui servent à modifier la forme de l'organe foliaire en fonction des conditions atmosphériques (repliement de la feuille sur elle-même). Des cellules pigmentées, avec une vacuole centrale riche en anthocyanes et flavonoïdes, confèrent des couleurs souvent vives aux pétales.

Comme les organes aériens, les racines possèdent également une couche de cellules superficielles qui fait fonction d'épiderme. Comportant souvent chez les racines jeunes des poils absorbants, elle porte le nom de rhizoderme. Étant donné la nature souterraine des racines, aucun stomate n'existe au niveau du rhizoderme (la présence de stomates qualifiant toujours un organe aérien).

L'épiderme est un tissu primaire, issu de la multiplication de cellules appartenant à un méristème primordial. Il est déjà présent dans les embryons enfermés à l'intérieur des graines, et porte alors le nom de protoderme. Les plantes possèdent cependant un tissu de revêtement d'origine secondaire bien particulier. Effectivement, quand une plante croit en diamètre, l'épiderme est condamné à subir une distension et à disparaître, pour être remplacé par un nouveau tissu de revêtement tardif, le périderme (abordé ci-dessous).

Le périderme

Le périderme constitue chez les plantes un type de tissu protecteur différent de l'épiderme, par son origine et ses fonctions. Généré par le fonctionnement d'un cambium secondaire (appelé phellogène ou cambium subéro-phellodermique) situé dans la zone corticale des racines et des tiges, son rôle principal est de contrer les effets périphériques et néfastes dû à l'accroissement du diamètre d'une plante, quand celle-ci prend de l'âge. Le périderme comprend l'assise cambiale elle-même et de chaque côté de cette dernière, une couche pouvant être conséquente de cellules mortes vers l'extérieur (le liège ou suber) et une couche relativement mince de parenchyme vivant (le phelloderme) vers l'intérieur.

Le phellogène est composé d'une seule assise de cellules rectangulaires, allongées dans le plan tangentiel et aplaties dans le plan radial. Il possède toutes les caractéristiques d'un cambium.

Le phelloderme, interne, est toujours de faible épaisseur. Il est initialement formé de cellules vivantes à parois pecto-cellulosiques. Celles-ci peuvent parfois se différencier avec l'âge en tissu de soutien (collenchyme ou sclérenchyme).

Le liège, externe, est au contraire un tissu mort. Sous le microscope, il apparaît constitué de cellules géométriquement alignées dont la paroi se recouvre de subérine, un composé organique complexe (polyesters et acides gras) imperméable aux gaz et à l'eau (et peu comme la cutine). Les cellules dont la paroi est imprégnée de subérine sont vouées à une mort certaine, tout comme, et c'est important, toutes les cellules des tissus situés à l'extérieur de cette interface subérifiée. L'ensemble des tissus morts extérieurs à la dernière couche de périderme formé porte le nom de rhytidome. Ce dernier se desquame souvent en plaques ou en écailles (délitement de l'écorce des troncs d'arbres par exemple).

 
  Tige âgée d'aristoloche (Aristolochia macrophylla), coupe transversale montrant deux lenticelles, Wacker (x5) L'image ci-dessus est annotée Tige ligneuse avec écorce recouverte de lichens, coupe transversale. L'aspect géométrique des cellules mortes du liège, à la paroi imprégnée de subérine et issues du cloisonnement du phellogène, apparaît très clairement. Etzold (x40) L'image ci-dessus est annotée
   
Racine d'Iris (Iris), coupe transversale montrant la couche subéroïde pluriassisiale (et accessoirement le parenchyme cortical à méats). Chez les monocotylédones, qui ne possèdent pas de formations secondaires, la subéroïde joue le rôle du suber. Wacker (x20) L'image ci-dessus est annotée    

Historiquement, le liège a été le premier matériel où furent décrites des cellules. C'est en effet au cours de l'année 1665 que le grand scientifique anglais Robert Hooke examina des coupeaux de liège avec un microscope rudimentaire composé, et découvrit une multitude de petites cavités géométriques qui lui évoquèrent des cellules de moine. Pour décrire ces minuscules compartiments, il employa pour la première fois le terme de cellules, peut-être sans de douter de l'importance que prendrait la notion de cellules en biologie. Il est d'ailleurs paradoxal de constater qu'à l'origine, le terme cellules a servi à décrire des vides. Des cellules du liège, il ne reste en effet que des parois entourant de l'air (ce qui explique d'ailleurs une partie des propriétés de ce matériau sans pareil, notamment sa légèreté et son imperméabilité à l'eau).

Étant par nature imperméable, le liège bloque forcément les échanges gazeux avec l'atmosphère, or ceux-ci doivent être maintenus pour que la plante puisse continuer à vivre. Des structures particulières, les lenticelles, vont fournir des ouvertures au niveau desquelles les échanges gazeux avec l'extérieur pourront avoir lieu. La couche de liège qui entoure les organes âgés (racines et tiges) de certaines plantes offre une bonne protection physique et thermique (c'est notamment grâce à leur écorce liégeuse que certaines espèces d'arbres peuvent survivre à des incendies).

Au cours de sa vie, une plante peut posséder une seule assise de cambium subéro-phellodermique, qui fonctionnera en permanence. Chez d'autres espèces, en fonction de l'âge, des couches d'extension plus ou moins limitée de phellogène peuvent se mettre en place dans les tissus profonds. En fonctionnant, ces couches vont alors repousser vers l'extérieur tous les tissus situés au-dessus (liège et phelloderme, mais également liber), en provoquant dans le même temps leur mort (c'est le rhytidome, dont nous avons déjà parlé). Le cambium subéro-phellodermique profond adopte souvent une forme dite en verre de montre, en délimitant de nombreuses lentilles de liège imbriquées les unes dans les autres, et qu'il est souvent facile de séparer en soulevant l'écorce.

Le liège qui entoure les racines ou les tiges présente généralement une épaisseur réduite. Il existe cependant des exceptions, comme celle bien connue du chêne liège (Quercus suber), un arbre exploité pour son écorce très riche en liège. Chez le chêne liège, la première assise subéro-phellodermique va d'abord donner naissance à un liège épais, dur et crevassé (liège mâle), présentant un faible intérêt commercial, et qui n'est pas d'assez bonne qualité pour fabriquer les bouchons. Lorsque ce liège est soulevé et enlevé pour mettre à nu le liber, une assise plus profonde de phellogène se met en place, en créant un liège homogène et plus souple (liège femelle) de bien meilleure qualité. Lorsqu'il est ôté, une nouvelle assise se remet en place, ce qui autorisera après un certain temps une nouvelle récolte. Le liège femelle est employé dans la fabrication des bouchons. Pour que ces derniers puissent jouer leur rôle d'étanchéité, il est impératif qu'ils soient bien orientés dans le liège ou ils sont taillés. Les lenticelles doivent être coupées sur les côtés de manière transversale ou longitudinale, et aucune ne doit se trouver sur les faces inférieures ou supérieures.

Au niveau de racines âgées, une couche superficielle plus ou moins épaisse de cellules peut aussi s'enduire de subérine, en formant un revêtement protecteur. C'est l'assise subéreuse chez les dicotylédones (à une seule couche de cellules), et la couche subéroïde chez les monocotylédones (à plusieurs couches cellulaires). Rappelons que les plantes monocotylédones ne possèdent pas de structures secondaires, et la couche subéroïde joue chez elles le même rôle que le suber du périderme chez les angiospermes dicotylédones et les gymnospermes. Au niveau d'une racine, la mise en place de l'assise subéreuse ou de la couche subéroïde (exoderme) provoque la mort des éventuels poils absorbants épidermiques appartenant à l'assise pilifère, et stoppe l'absorption d'eau et de sels minéraux pour le segment concerné par la subérisation. Seul va persister alors la fonction d'ancrage au sol.

Les parenchymes

Sous le terme de parenchyme, on désigne le tissu fondamental constituant les différents organes végétaux. Les parenchymes sont généralement composés de cellules peu différenciées et donc peu spécialisées, à paroi pecto-cellulosique fine. Les cellules parenchymateuses arborent parfois des formes très géométriques, mais sont souvent arrondies, ce qui fait qu'au niveau des zones de contact subsiste un vide, que l'on nomme méat. Les méats confèrent une structure lâche aux tissus parenchymateux, et jouent un rôle important pour les échanges gazeux (circulation d'oxygène nécessaire à la respiration cellulaire, et de dioxyde de carbone indispensable à la photosynthèse réalisée au niveau des feuilles et tiges). Les cellules de parenchyme communiquent entre elles par des ouvertures ménagées dans la paroi cellulaire, les plasmodesmes, et elles sont donc physiquement au niveau cytoplasmique toutes reliées les unes avec les autres.

Bien qu'ils soient souvent décrits comme des tissus de remplissage, terme qui semble impliquer une certaine passivité, les parenchymes remplissent des fonctions essentielles pour les plantes. On distingue ainsi :

 
Parenchyme fondamental de remplissage dans une tige de valériane (Valeriana officinalis) vue en coupe transversale. A cause de la forme assez géométrique des cellules, les méats sont d'assez petites tailles. Etzold FCA (x40) L'image ci-dessus est annotée Parenchyme de réserve amylifère dans une racine de néottie nid-d'oiseau (Neottia nidus-avis) vue en coupe transversale. Les grains d'amidon (un polymère de glucose), qui constituent pour la plante une réserve, sont ici de petites dimensions. Etzold FCA (x40) L'image ci-dessus est annotée  
 
  Parenchyme aérifère (aérenchyme) dans une tige de pesse d'eau (Hippuris vulgaris) vue en coupe transversale. Il s'agit d'une adaptation à l'environnement aquatique, pauvre en oxygène. Carmino-vert de Mirande (x10) L'image ci-dessus est annotée Parenchyme aérifère étoilé dans une tige de jonc (Juncus) vue en coupe transversale. Là encore, ce parenchyme très esthétique est une adaptation à un environnement pauvre en air. Carmino-vert de Mirande (x40) L'image ci-dessus est annotée
 
Limbe d'une feuille succulente d'Aloe vera, coupe transversale, parenchyme aquifère, Wacker (x10) L'image ci-dessus est annotée Racine d'iris (Iris), coupe transversale, parenchyme cortical de réserve à méats, Etzold (x40) L'image ci-dessus est annotée  
   
    Feuille de frangipanier (Plumeria), coupe transversale, parenchyme palissadique assimilateur chlorophyllien, Etzold (x15) L'image ci-dessus est annotée

D'un point de vue évolutif, les parenchymes sont issus de méristèmes primaires ou secondaires. Pour le second cas, on peut par exemple citer le phelloderme, formé par l'activité du cambium secondaire subéro-phellodermique, ou les parenchymes des rayons libériens ou ligneux dus au fonctionnement du cambium secondaire libéro-ligneux. Au cours du temps, les parenchymes peuvent évoluer de différentes façons : ils peuvent soit se résorber (en créant par exemple au centre des organes un vide, comme dans les tiges creuses des menthes ou du chanvre), les parois cellulaires initialement pecto-cellulosiques peuvent se lignifier (parenchyme ligneux du bois) ou se subériser (assise subéreuse ou subéroïde des racines). Enfin, quand la situation l'exige, les parenchymes peuvent également se dédifférencier pour redonner naissance à des cellules méristématiques totipotentes (régénération d'un organe perdu, fabrication d'un organe adventif comme des racines, etc.). Les parenchymes sont donc en première ligne dès qu'il s'agit pour une plante de soigner une blessure.

Les tissus conducteurs

Contrairement au monde animal, les plantes possèdent des tissus et organes que l'on pourrait qualifier de relativement simples. Aucun système véritablement respiratoire, nerveux, excréteur ou encore circulatoire ne se rencontrent effectivement chez les végétaux. Les plantes supérieures possèdent bien un système vasculaire, qui sert à faire circuler dans la plante deux types de sèves, la sève brute (eau et sels minéraux en provenance des racines), et la sève élaborée, riche en substances organiques et fabriquées par les cellules chlorophylliennes des feuilles (ou de certaines tiges). Ce système vasculaire ne peut cependant pas se comparer au système circulatoire sophistiqué des animaux supérieurs, car il n'est pas clos (il n'existe pas de connexion entre le circuit de la sève brute et celui de la sève élaborée), et il ne dispose pas d'une pompe proprement dite (l'équivalent d'un cœur).

Néanmoins, le système de conduction des sèves des plantes vasculaires présente une certaine complexité, qui s'exprime principalement au niveau des éléments cellulaires qui le constituent. Nous allons d'abord nous intéresser au système responsable de la circulation de la sève brute, le xylème, avant de passer au phloème, qui lui prend en charge la sève élaborée.

Le xylème

Chez les plantes vasculaires, le xylème est le tissu responsable du transport dans le sens ascendant de la sève brute émanant de la captation des racines, et qui est composée d'eau et de sels minéraux, vers tous les autres organes d'un individu donné. Outre sa fonction de conduction, surtout quand il est largement développé pour former du bois, le xylème sert également au soutien, au rétablissement de la posture si celle-ci a varié, au stockage de réserves ainsi qu'à la défense, principalement contre des menaces biologiques (champignons, insectes).

Comme pour le phloème, on distingue deux types de xylème, le xylème primaire (xylème I) et le xylème secondaire (xylème II). Le xylème primaire est issu du fonctionnement d'un méristème primordial (le procambium), présent chez l'embryon contenu dans la graine et la jeune plantule si la graine en question parvient à germer. Le xylème secondaire (que l'on appelle aussi bois) est quant à lui généré par le cambium secondaire libéro-ligneux, qui n'existe que chez les angiospermes dicotylédones et les gymnospermes.

Le xylème est un tissu particulièrement complexe, formé d'éléments conducteurs, de fibres de soutien et de cellules parenchymateuses souvent vivantes. Les éléments conducteurs sont des cellules mortes allongées, dont la paroi secondaire est imprégnée de lignine, un polymère organique phénolique (polyphénols), possédant une structure tridimensionnelle compliquée et qui augmente considérablement la résistance des tissus végétaux lignifiés (la lignine retardant également fortement leur dégradation). Au niveau évolutif, la lignine est apparue il y a environ 400 millions d'années, ce qui coïncide avec la colonisation du milieu terrestre par les premières plantes aériennes. Pour la plante, il est possible que la lignine soit un déchet, mais qui ne serait pas évacué à l'extérieur, mais au contraire conservé dans l'organisme. Même s'il s'agit d'abord d'un rebut métabolique, la lignine joue un rôle fondamental chez les plantes aériennes, et son importance est également considérable pour les activités humaines.

Les éléments conducteurs (ou éléments de vaisseaux) du xylème sont emboîtés en file indienne les uns avec les autres, de manière à former des conduits ou vaisseaux sur de grandes longueurs. Les cloisons transversales sont généralement perforées, quand elles ne sont pas entièrement manquantes. Les éléments conducteurs possèdent également des ponctuations latérales de différents types, qui permettent une circulation transverse des liquides, ainsi qu'un blocage de l'air. Ces ponctuations peuvent être de petites tailles et simples (comme chez les angiospermes), ou au contraire de plus grandes tailles et complexes (ponctuations aréolées et semi aréolées des gymnospermes).

Dans ces tubulures plus ou moins longues, constituées d'éléments cylindriques mis bout à bout, la sève circule sous la forme de colonnes d'eau. Le moteur responsable du maintien de ces colonnes d'eau, et donc de leur circulation, est l'aspiration provoquée par l'évaporation, au niveau des feuilles, de l'eau. L'une des conséquences de cette aspiration est que la pression à l'intérieur des vaisseaux du xylème est plus faible que la pression atmosphérique. Pour éviter que les cellules ne s'affaissent sur elles-mêmes ou ne collapsent totalement sous cette pression négative (dont la valeur est élevée en période de sécheresse et donc de forte transpiration), les parois cellulaires (qui peuvent être vues comme une armature) doivent être rigidifiées, d'où les dépôts de lignine. Dans ce système, les bulles d'air sont absolument indésirables. Quand elles sont présentes, elles provoquent une embolie, qui conduit à un arrêt de la circulation de la sève (le vaisseau touché est dit embolisé). Pour éviter les embolies, les plantes vont mettre en place différentes stratégies (même si, à plus ou moins long terme, ces dernières sont inévitables). Ainsi, chez les gymnospermes, les ponctuations aréolées des trachéides peuvent bloquer les bulles d'air, et les empêcher de passer d'une trachéide embolisée et condamnée à une autre saine. Chez les angiospermes, les ponctuations simples peuvent aussi servir de barrage à l'air, mais de manière plus limitée. Pour compenser, un autre mécanisme (une pression positive générée au niveau des racines) peut être mise en œuvre pour dégager des vaisseaux embolisés.

Deux grands types d'éléments conducteurs sont reconnus au sein du xylème : les trachéides (ou éléments de vaisseaux imparfaits), et les trachées (ou éléments de vaisseaux parfaits). Arrêtons-nous un instant pour faire un point de vocabulaire. Comme nous l'avons vu, les conduits du xylème sont des tubes composés de l'articulation d'éléments cylindriques vides emboîtés les uns dans les autres. Ces unités constitutives sont appelées des éléments, tandis que les conduits portent le nom de vaisseaux. Il arrive hélas assez souvent, par exemple pour des raisons de facilité, qu'un élément de vaisseau soit confondu avec le vaisseau lui-même. Dans certains ouvrages, le terme "élément de vaisseau" est synonyme d'élément de vaisseaux vrais (comprendre ceux des angiospermes, c'est à dire les trachées), et il est mis en opposition avec les trachéides. Selon la façon dont les choses sont présentées, le texte peut facilement devenir confus.

Les trachéides

Pour ce qui est des trachéides, elles sont présentes notamment au niveau des ptéridophytes (fougères) et des gymnospermes (conifères), et elles persistent encore également chez certaines plantes à fleurs (angiospermes). Elles comprennent des éléments de relativement petit diamètre, de forme allongée et dont les extrémités obliques se chevauchent l'une sur l'autre, ce qui leur permet de s'abouter pour former des conduits.

 
 Pétiole de fronde de fougère aigle (Pteridium aquilinum), coupe longitudinale, trachéides scalariformes, safranine/vert rapide (x37) L'image ci-dessus est annotée  Pétiole de fronde de fougère aigle (Pteridium aquilinum), coupe longitudinale, zone de chevauchement oblique entre les extrémités en biseau de deux trachéides scalariformes, safranine/vert rapide (x37) L'image ci-dessus est annotée  

Chez les ptéridophytes, les trachéides sont dites scalariformes, car l'ornementation de la lignine déposée sur les parois rappelle les barreaux d'une échelle. Chez les gymnospermes, les trachéides portent des ponctuations dites aréolées, ce qui permet de les reconnaître facilement à l'examen microscopique. Comme nous l'avons vu, les parois des éléments conducteurs du xylème sont percées d'ouvertures, appelées ponctuations, qui permettent les échanges entre éléments vasculaires. A ces ponctuations intervasculaires s'ajoutent d'autres ponctuations, entre des éléments vasculaires et des cellules parenchymateuses (que ce soit celles des rayons ligneux horizontaux ou celles du parenchyme ligneux longitudinal).

Arrêtons-nous un instant sur les ponctuations. Il en existe globalement trois types. D'un côté, on trouve les ponctuations simples, qui sont grosso- modo de simples perforations où la paroi secondaire est absente, pour ne laisser que la paroi primaire et la lamelle moyenne (ce qui forme une sorte de membrane au travers de laquelle la sève brute peut passer).

Les ponctuations dites aréolées des gymnospermes sont plus complexes. Au niveau de ces dernières, on observe un décollement des parois cellulaires secondaires à la périphérie de la ponctuation, et une absence des parois secondaires au centre, ce qui forme une sorte de dôme percé en son milieu (dont le volume interne s'appelle la chambre). Un diaphragme, constitué par la lamelle moyenne et la paroi primaire cellulosique subsiste au niveau de la ponctuation. Non seulement ce secteur particulier n'est pas lignifié, mais il est également partiellement hydrolysé pour former une sorte de filtre au travers duquel la sève peut passer. De plus, la zone centrale lenticulaire de la ponctuation aréolée, dont la paroi primaire est épaissie et qui forme une structure appelée torus, peut venir se plaquer sur l'ouverture de la ponctuation pour la colmater efficacement à la manière d'un bouchon. Ce mécanisme rentre en jeu dans le cas d'une embolie : la pression dans une trachéide embolisée étant devenue supérieure à celles des trachéides environnantes, les torus de toutes les ponctuations peuvent être aspirées, provoquant ainsi l'isolement de la trachéide devenue dysfonctionnelle. Le mécanisme est ici totalement passif, les trachéides étant des cellules mortes. Chez les gymnospermes, on reconnaît deux types de ponctuations aréolées : les ponctuations aréolées de type abiétinéen (décrites chez Abies, les sapins), qui sont les plus courantes, et les ponctuations aréolées de type araucarien, qui sont par exemple observables au niveau du bois d'Araucaria. Les ponctuations de type abiétinéen sont rondes et espacées, tandis que les ponctuations de type araucarien sont polygonales et serrées les unes contre les autres.

Enfin, il existe des ponctuations semi-aréolées, qui comme leur nom l'indique sont simples sur une face (par exemple du côté d'une cellule parenchymateuse), et aréolées sur l'autre face (du côté d'un élément conducteur, c'est à dire d'une trachéide).

Au niveau du bois, sur des coupes transversales, les trachéides formées au printemps (qui constituent le bois initial) possèdent une section carrée et des parois minces : leur rôle est principalement conducteur. Au contraire, les trachéides mises en place en été et en automne dans le bois final ont une section rectangulaire et des parois plus épaisses. En plus de leur fonction conductrice, elles servent également au soutien. Selon les espèces, le passage entre le bois final d'une année et le bois initial de l'année suivante (ce qui définit une limite de cerne) peut être progressif (par exemple chez l'épicéa), ou au contraire brutal (chez le mélèze). Notons pour terminer que chez certains gymnospermes (sapin de Douglas, if), la couche la plus interne de la paroi secondaire des trachéides peut porter des épaississements spiralés caractéristiques. Ces derniers peuvent être fins, épais, ou encore former des motifs complexes.

Les trachées

Au contraire des trachéides qui viennent d'être décrites, les trachées (éléments de vaisseaux parfaits) sont plus trapues et de plus grands diamètres, ce qui les rendent plus performantes pour la conduction de la sève brute. En effet, selon la loi de Poiseuille, la capacité de conduction (ou conductance) d'un conduit dépend du diamètre élevé à la puissance 4 (un vaisseau de diamètre 1 conduira autant de fluide que 16 vaisseaux dont le diamètre est inférieur de moitié). L'inconvénient des vaisseaux est qu'ils sont plus sensibles à l'embolie (paralysie de la circulation par une bulle d'air) que les trachéides. Les trachées existent uniquement chez les angiospermes (souvent en complément de trachéides), et sont considérées comme une évolution par rapport à ces dernières. Au niveau des trachées, les parois terminales (cloisons transversales) des éléments de vaisseaux sont horizontales (ceux-ci s'empilent donc les uns sur les autres un peu comme des tonneaux), et non obliques et chevauchantes comme dans le cas des trachéides. De plus, ces cloisons terminales sont plus ou moins perforées, de manière à permettre le passage de la sève brute avec le maximum de facilité. La perforation est parfois complète, la cloison terminale ayant totalement disparue à l'exception d'un bourrelet périphérique. Dans d'autres cas, des portions de la double paroi de deux éléments contigus peuvent subsister, par exemple en ménageant un plus ou moins grand nombre de fentes oblongues.

 
  Tige de courge (Cucurbita), coupe longitudinale, petit vaisseau annelé du protoxylème vu sur deux plans focaux différent, et montrant clairement les épaississements en anneaux lignifiés (x20) L'image ci-dessus est annotée Tige de bryone dioïque (Bryonia dioica), coupe longitudinale, vaisseaux spiralés (x20) L'image ci-dessus est annotée

Suivant l'importance de l'ornementation en lignine des éléments conducteurs du xylème, on distingue plusieurs types de vaisseaux (qu'ils soient imparfaits ou parfaits). Les vaisseaux les moins lignifiés présentent simplement des anneaux de lignine (vaisseaux annelés) ou une lignification en spirale (vaisseaux spiralés). On les rencontre au niveau d'un type de xylème primaire appelé protoxylème. Ce sont généralement des trachéides de faible diamètre, les parois incomplètement lignifiées autorisant encore une croissance verticale (élongation) des axes. Comme une coupe transversale a souvent peu de chance de passer par un anneau ou une spirale, les éléments conducteurs du proto-xylème apparaissent souvent comme des cellules à parois cellulosiques, et ils peuvent alors passer facilement inaperçus (être oubliés) à l'examen microscopique si ce dernier n'est pas conduit avec attention. Représentant les éléments les plus anciens du xylème mis en place, le protoxylème forme sur des coupes transversales ce que l'on appelle le pôle ligneux.

Par opposition au protoxylème jeune et primaire, on trouve ensuite le méta-xylème, type de xylème (primaire ou secondaire), qui comprend des éléments conducteurs de plus grands diamètres, et dont les parois cellulaires sont lignifiées de manière cette fois ci importante (ce qui fait que la croissance en longueur n'est plus possible). Au niveau des éléments conducteurs du métaxylème, la lignification des parois cellulaires va progressivement augmenter. On va ainsi pouvoir distinguer des vaisseaux rayés, porteurs d'épaississements lignifiés qui zèbrent les parois en donnant l'impression de rayures. Ces rayures vont ensuite commencer à s'anastomoser dans les rayons dit réticulés. Enfin, avec les vaisseaux ponctués (qui constituent exclusivement le bois vrai, c'est à dire le xylème secondaire), le recouvrement en lignine des parois est tel qu'il ne subsiste plus que des petites ouvertures appelées ponctuations, et dont nous avons déjà parlé.

Pour le méta-xylème primaire, les éléments conducteurs sont des trachéides. Pour le méta-xylème secondaire, les éléments conducteurs restent des trachéides dans le cas des gymnospermes, ou comprennent à la fois des trachéides et des trachées (vaisseaux vrais) chez les angiospermes. Dans une coupe transversale, il est souvent possible de distinguer le méta-xylème primaire du secondaire, car pour ce dernier, les éléments se présentent en file radiale étant donné le cloisonnement régulier du cambium générateur dont ils proviennent.

Un zoom très bref sur le bois (xylème secondaire)

A ce stade de la discussion, disons quelques mots du bois (un terme qui en botanique désigne donc le xylème secondaire). Nous serons ici très succinct, car le bois est un sujet aussi passionnant qu'étendu (une science entière, la xylologie, lui est dédié), et il a joué (et continue de jouer) un rôle considérable dans le développement de l'humanité.

L'examen microscopique d'un bois doit idéalement toujours avoir lieu selon trois plans différents et complémentaires : le plan traverse (coupes transversales), le plan radial (coupes longitudinales radiales) et enfin le plan tangentiel (coupes longitudinales tangentielles).

L'aspect du bois diffère radicalement selon le plan de coupe choisi. Ainsi, en prenant comme exemple le bois de gymnospermes, les coupes transversales effectuées sur une branche ou un échantillon de bois retiré d'un tronc vont permettre d'observer la section (carrée ou rectangulaire) des trachéides longitudinales, le passage du bois initial au bois final (limites de cerne) ainsi que sa nature brutale ou progressive, les ponctuations aréolées en coupe, les canaux sécréteurs longitudinaux, et pour fini les files de cellules rectangulaires du parenchyme ligneux horizontal. Sur des coupes longitudinales radiales, les ponctuations aréolées seront vues de face, tandis que le parenchyme ligneux horizontal croisera à 90° les trachéides au niveau de secteurs appelés champs de croisement, et dont les ponctuations sont caractéristiques. Le plan radial permettra également de déceler d'éventuelles trachéides horizontales associées aux rayons ligneux, ainsi que les ornementations spiralées potentielles des trachéides longitudinales. Enfin, avec des coupes longitudinales tangentielles, le parenchyme ligneux horizontal sera sectionné transversalement, et dévoilera sa nature unisériée (une seule file de cellules) ou au contraire plurisériées (plusieurs files cellulaires). La hauteur et la largeur des rayons ligneux pourra être appréciée. Les canaux sécréteurs radiaux (associés à des rayons ligneux élargis en fuseaux) seront également visibles.

Chez les angiospermes dicotylédones et les gymnospermes, le bois se met en place grâce à l'activité d'un méristème secondaire, le cambium libéro-ligneux. Cette assise cambiale met en place du liber (ou phloème) vers l'extérieur, et du xylème vers l'intérieur. Au printemps, après la pause hivernale, le cambium libéro-ligneux donnera naissance à un bois initial possédant un petit nombre de gros vaisseaux. Au contraire, en été et en automne, l'activité cambiale va se modifier, et un bois à vaisseaux plus petits, avec plus de fibres, sera synthétisé par la plante. Sur des coupes végétales qui s'y prêtent, il est essentiel de repérer le bois de printemps du bois d'été, car cela permet d'orienter la coupe, en identifiant les parties anciennes existant au centre et les parties plus jeunes situées en périphérie. De plus, comme le montre des souches d'arbres coupées par des forestiers en forêt, des cernes plus ou moins visibles délimitent le bois mis en place année après année. En les comptant sur une coupe transversale, il est donc possible de déterminer l'âge du spécimen que l'on observe. L'étude des cernes du bois en vue d'une datation est une discipline qui porte le nom de dendrochronologie, sachant que l'examen plus poussé des cernes permet également souvent de remonter à des informations écologiques ou climatiques.

 
Tige de sapin (Abies) de 3 ans, coupe transversale, détail du bois homoxylé avec cernes, trachéides et rayons ligneux, Carmino-vert de Mirande (x20) L'image ci-dessus est légendée   Bois d'une tige de Pin (Pinus), coupe longitudinale radiale, trachéides aréolées et rayons parenchymateux horizontaux, Etzold FCA (x100) L'image ci-dessus est légendée
Bois d'une tige de Pin (Pinus), coupe transversale, bois homoxylé à trachéides longitudinales et parenchyme ligneux horizontal, Etzold FCA (x40) L'image ci-dessus est annotée Bois d'une tige de Pin (Pinus), coupe longitudinale radiale montrant les trachéides aréolées (vues dans le sens de la longueur) et des rayons ligneux parenchymateux horizontaux formant des champs de croisement typiques à ponctuations fenestriformes, Etzold FCA (x20) L'image ci-dessus est annotée Bois d'une tige de Pin (Pinus), coupe longitudinale tangentielle montrant les trachéides aréolées (vues dans le sens de la longueur) ainsi que des ligneux rayons parenchymateux horizontaux. Ces derniers sont unisériés, l'aspect fusiforme de l'un d'eux indiquant la naissance d'un canal résinifère radial. Etzold FCA (x20) L'image ci-dessus est annotée
   
  Bois hétéroxylé de tilleul argenté (Tilia tomentosa), coupes transversale, radiale et tangentielle, Etzold (x10) L'image ci-dessus est légendée et annotée  

Un autre élément notable qui ressort de l'examen microscopique du bois est son homogénéité apparente, ou au contraire son hétérogénéité. Un bois constitué d'éléments de taille homogène, comme le bois des gymnospermes avec ses trachéides, est dit homoxylé. Au contraire, un bois composé de différents éléments de tailles variées est désigné sous le terme d'hétéroxylé (c'est le cas du bois des angiospermes).

Dans le bois homoxylé des conifères, les trachéides jouent non seulement un rôle conducteur, mais également un rôle de soutien (c'est pour cela qu'elles sont parfois appelées fibres-trachéides). La plus grande majorité des trachéides sont longitudinales, mais on peut également trouver des trachéides radiales associées au parenchyme radial des rayons ligneux. Au contraire, dans le bois hétéroxylé, les trachéides et trachées ont souvent un rôle dédié au transport de la sève brute, et la fonction de soutien est alors dévolue à des cellules lignifiées de petits diamètres, plus ou moins longues, à parois épaissies et à cloisons transversales (ce qui fait que leur rôle conducteur est très réduit), les fibres. Ces fibres peuvent être isolées par différentes méthodes (dont celle du rouissage), pour remplir différents usages en fonction de leurs propriétés mécaniques.

En plus des vaisseaux et des fibres qui sont dans tous les cas des cellules mortes, le bois contient également des cellules vivantes parenchymateuses. On classe ces parenchymes selon la direction dans laquelle ils se déploient : on distingue ainsi le parenchyme ligneux vertical, qui suit les vaisseaux et les fibres le long de leur trajet vertical, et le parenchyme ligneux horizontal, constitué de cellules allongées perpendiculairement aux éléments conducteurs (vu sur un plan de coupe transversale, le parenchyme horizontal forme des rayons ligneux disposés radialement, et courant éventuellement depuis le centre). Le terme ligneux indique ici que le parenchyme est lié au bois, et non que les cellules sont imprégnées de lignine (lignifiées). Ce peut être en effet le cas (les parois étant alors piquetées de nombreuses ponctuations simples), mais les parois cellulaires peuvent aussi rester pecto-cellulosiques. Les vaisseaux, fibres et cellules du parenchyme ligneux vertical sont formés par des cellules cambiales appelées initiales longues. Les cellules initiales courtes donnent quant à elles le parenchyme des rayons ligneux.

Parenchyme ligneux vertical

Au sein du bois, le parenchyme ligneux vertical joue surtout un rôle de stockage, et ses cellules contiennent souvent des grains d'amidon (ce qui permet de les reconnaître aisément sur les coupes, le contenu cellulaire pouvant également comprendre des vésicules résineuses, des cristaux). Les réserves engrangées dans le bois sont notamment sollicitées pour la reprise de la croissance au printemps (débourrage des bourgeons, etc.). Les cellules du parenchyme ligneux vertical peuvent aussi boucher les vaisseaux conducteurs pendant la mauvaise saison, en formant des thylles (l'obturation a lieu par intrusion de la cellule parenchymateuse qui déborde et gonfle un peu comme une bulle de chewing-gum dans la lumière du vaisseau). Si ces colmatages sont souvent permanents, ils peuvent dans certains cas disparaître avec le retour du printemps, en permettant à nouveau à la sève brute de circuler librement. A côté des thylles normaux, on trouve également des thylles traumatiques, mis en place suite à une agression. L'obturation des éléments conducteurs peut aussi avoir lieu par des gommes, secrétées là encore par les cellules parenchymateuses.

Les cloisons qui séparent les files de cellules du parenchyme ligneux vertical peuvent être minces et lisses, ou au contraire épaisses et ponctuées (elles sont alors dites nodulaires). Que ce soit sur des coupes radiales ou tangentielles, le parenchyme longitudinal se distingue des éléments conducteurs par la présence de ces cloisonnements. Nous l'avons déjà mentionné, il est également reconnaissable par son contenu cellulaire. Sur des coupes transversales, des cloisons terminales perforées de façon simple sont également parfois visibles. Sur ce plan de coupe, les cellules parenchymateuses longitudinales peuvent aussi se reconnaître à leur petite section (leur diamètre est inférieur à celui des éléments conducteurs, et s'il est similaire à celui des fibres, celles-ci présentent souvent une paroi bien plus épaisse).

Parenchyme ligneux horizontal

Comme le parenchyme ligneux vertical, le parenchyme ligneux horizontal sert également au stockage de réserves, mais permet aussi le transport de substances organiques à destination des cellules vivantes situées dans le bois à grandes distances du phloème. En effet, si ces dernières n'étaient pas approvisionnées en sève élaborée, elles seraient condamnées à plus ou moins court terme. C'est d'ailleurs ce qui se passe au niveau du duramen, la partie la plus interne, centrale, d'un bois (par opposition à l'aubier, partie périphérique d'un tronc au sein de laquelle les cellules du parenchyme sont encore vivantes). Le parenchyme horizontal forme les rayons ligneux, qui peuvent être homocellulaires (un seul type de cellule), ou au contraire hétérocellulaire (cellules parenchymateuses couplées à des trachéides horizontales radiales). Sur des coupes radiales, les rayons ligneux croisent à 90° les éléments conducteurs (trachéides et/ou trachées) en formant des champs de croisement caractéristiques qui ressemblent parfois à des petits murs de brique disposés ici et là. Ces champs de croisement portent des ponctuations bien particulières, classées en différents types et à valeur diagnostique : on reconnaît ainsi des ponctuations picéoïdes, cupressoïdes et taxodioïdes semblables à des yeux, des ponctuations pinoïdes mimant des œufs, ou encore des ponctuations fenestriformes (semblables à des fenêtres), et dont la surface occupe presque toute la hauteur d'un rayon ligneux. Chez les résineux, ces ponctuations sont semi-aréolées (ponctuation aréolée côté trachéide et ponctuation simple côté parenchyme), et prennent sur des coupes radiales la forme d'un petit poisson.

Canaux sécréteurs

Le bois peut enfin comporter des cellules et canaux sécréteurs. Ceux-ci sont en particulier très fréquents chez les gymnospermes, ou ils synthétisent de la résine, d'où le terme de résineux employés pour désigner les conifères. La résine peut être présente en grandes quantités dans le bois, il suffit de faire l'erreur de s'asseoir sur une souche de conifère, de casser une branche ou de briser un cône femelle pour s'en apercevoir.

Sur les coupes, les canaux sécréteurs prennent l'aspect de cavités à section ronde, bordées de cellules épithéliales sécrétrices, et dont les parois restées cellulosiques peuvent être minces ou au contraire épaisses. Les canaux peuvent être développés soit dans l'axe longitudinal (ils s'observent alors sur des coupes transversales), ou dans l'axe horizontal. Ces canaux sécréteurs radiaux ressortent alors sur les coupes tangentielles, ou ils élargissent des rayons ligneux qui prennent alors une forme en fuseau. Une observation attentive montre que dans tous les cas, les canaux sécréteurs restent connectés à des cellules parenchymateuses des rayons ligneux, qui assurent aux cellules épithéliales une alimentation constante en sève élaborée indispensable à leur fonction de sécrétion. A côté des canaux existant naturellement dans le bois, on trouve parfois des canaux sécréteurs d'origine traumatiques, formés en réaction à une agression, et qui peuvent s'observer chez des espèces ne possédant pas de canaux normaux.

Faisceaux cribro-vasculaires

Au niveau des tiges et des feuilles des plantes vasculaires, le xylème fait partie intégrante de ce que l'on nomme faisceaux cribro-vasculaires. En latin, le terme cribus signifie crible, et cribro-vasculaire indique donc l'association de cribles (sous-entendu du phloème) avec des éléments vasculaire (comprendre éléments vasculaires du xylème). Il est à noter que le terme criblo-vasculaire (en lieu et place de cribro-vasculaire) se rencontre encore parfois dans certains ouvrages récents de référence, avec comme justification le fait qu'il soit sans doute plus exact.

 
Tige de bryone (Bryonia dioica), coupe transversale, faisceau cribro-vasculaire bi-collatéral à gros vaisseaux du métaxylème secondaire, Etzold FCA (x9) L'image ci-dessus est annotée   Tige de souchet à papier ou papyrus (Cyperus papyrus), coupe transversale, détail d'un faisceau vasculaire, Wacker (x23) L'image ci-dessus est annotée

En botanique, le terme cribro-vasculaire (ou criblo-vasculaire donc) désigne des assemblages conducteurs qui comportent à la fois du xylème (responsable du transport la sève brute) et du phloème (qui conduit la sève élaborée). Au niveau des racines, le xylème et le phloème primaire sont généralement en alternance, et ils ne sont donc pas topologiquement associés. Au contraire, dans les tiges et les feuilles, xylème et phloème sont superposés, le xylème étant en position interne, et le phloème en position externe. Au sein d'une feuille typique, le xylème est toujours en haut (vers la face supérieure, ventrale, abaxiale), tandis que le phloème est en bas (vers la face inférieure, dorsale, adaxiale). Chez de nombreuses espèces, les faisceaux cribro-vasculaires des tiges peuvent être protégés par une calotte externe de sclérenchyme, dite péricyclique, car elle occupe la place qu'aurait eu le péricycle s'il avait été visible.

Sur une coupe histologique végétale, la position interne ou externe des éléments les plus anciens et les plus récents du xylème a son importance. Ainsi, lorsque le pôle ligneux (qui rappelons-le est constitué par les trachéides annelées ou spiralées du proto-xylème) est appuyé sur le péricycle, en position externe, tandis que les éléments de plus grand diamètre du métaxylème primaire sont situés au centre. Le xylème est alors dit exarche ou centripète, et cette situation est celle des racines. Dans le cas inverse (pôle ligneux situé vers l'intérieur et progression du xylème vers l'extérieur), le xylème est défini comme centrifuge ou endarche (c'est le cas des tiges). Il n'est hélas cependant pas toujours possible d'identifier sur une coupe le pôle ligneux et les éléments du métaxylème primaire, étant donné que ceux-ci peuvent avoir été écrasés ou résorbés suite au développement du xylème secondaire (qui est toujours un métaxylème, il n'y a pas de pôles ligneux secondaires).

Au niveau des tiges des plantes dicotylédones, les faisceaux cribro-vasculaires sont disposés en petit nombre au niveau d'une structure appelée cylindre central, délimitée par un péricycle. On distingue alors classiquement, de la périphérie vers le centre, un épiderme, un parenchyme cortical situé à l'extérieur du cylindre central, le cylindre central lui-même avec ses faisceaux cribro-vasculaires, et enfin un parenchyme médullaire situé à l'intérieur du cylindre central. Chez les monocotylédones, au contraire, les faisceaux cribro-vasculaires sont disséminés en grand nombre dans la tige, et en l'absence d'un cylindre central, on ne peut distinguer un parenchyme cortical d'un parenchyme médullaire.

Terminons en notant que le bois n'est pas uniquement une sorte de squelette ou d'armature passive sur lequel une plante s'appuie pour se tenir droite et progresser vers le ciel. Dans certains cas, un arbre ou un arbuste peut avoir commencé à se développer dans une posture non optimale (par exemple en réponse à une caractéristique de l'environnement, comme des vents violents). La plante peut alors tenter de redresser les choses, en produisant un bois dit de réaction (bois de compression produit du côté comprimé du tronc pour les gymnospermes et bois de tension mise en place du côté en extension du tronc pour les angiospermes), qui possédera alors des caractéristiques histologiques particulières.

Le phloème

Chez les plantes vasculaires, le phloème est le deuxième type de tissu conducteur, en compagnie du xylème. Son rôle est de transporter la sève élaborée (sucres et autres métabolites fabriquées par la plante grâce à la photosynthèse) depuis les feuilles vers tous les autres organes de la plante, ceci dans le sens descendant (tiges, racines) mais également dans le sens montant (bourgeons, fleurs, etc.). Dans nos régions tempérées, au printemps et en été, les plantes accumulent des réserves (par exemple de l'amidon dans le bois ou les racines) en prévision des mauvaises saisons. En automne et en hiver, elles vivent souvent sur ces réserves, qui sont alors mobilisées et transportées par le phloème.

Comme pour le xylème, les botanistes distinguent deux types de phloème : le phloème primaire (phloème I), issu de l'activité d'un méristème fondamental, le procambium, et le phloème secondaire (phloème II), mis en place par le cambium libéro-ligneux du côté externe. Le phloème est également souvent désigné par le terme liber, ce qui signifie livre en latin. Effectivement, les cellules du phloème sont souvent empilées les unes sur les autres, et forment une structure laminée qui rappelle un peu les pages d'un livre.

Tige de bryone dioique (Bryonia dioica), coupe transversale, tubes criblés du phloème, Etzold FCA (x40) L'image ci-dessus est annotée Tige de bryone dioique (Bryonia dioica), coupe longitudinale, tube criblé du phloème avec cal, Safranine/bleu astral (x100) L'image ci-dessus est annotée Tige de bryone dioique (Bryonia dioica), coupe transversale, tubes criblés du phloème (à gauche) et cal (à droite). Etzold FCA (x100) L'image ci-dessus est légendée
   
  Tige de bryone dioïque (Bryonia dioica), coupe longitudinale, tube criblé avec cals (x20) L'image ci-dessus est annotée  

Le phloème est un tissu conducteur vivant qui comporte moins d'éléments que le xylème, mais il est plus sophistiqué dans son fonctionnement intime. Le phloème dans son ensemble est constitué de tubes criblés flanqués de cellules compagnes, de parenchyme libérien et parfois de fibres libériennes (cellulosiques ou lignifiées). Contrairement au bois, la surface occupée par le liber dans un organe donné reste toujours modeste, quel que soit l'âge de la plante. De plus, le phloème le plus ancien est très souvent écrasé par le développement des tissus secondaires, et sur des spécimens âgés il n'est souvent plus possible de l'étudier.

Les tubes criblés sont les éléments conducteurs du phloème. Ils sont formés par des files de cellules restées vivantes, à parois cellulosiques, et qui communiquent les unes avec les autres par des cloisons transverses obliques et perforées à de multiples endroits (appelées cribles). Ces cribles peuvent être simples, ou au contraire composés. Chez les ptéridophytes (fougères) et gymnospermes (conifères), les cribles existent également sur les parois verticales des tubes. Chez les plantes à fleurs (angiospermes), les tubes criblés sont assistés de cellules compagnes, qui permettent la survie des cellules criblées (ces derniers ont effectivement perdu de nombreux organites cellulaires, noyaux y compris), et qui peuvent au besoin les remplacer quand celles-ci deviennent non fonctionnelles.

A l'approche de l'hiver, les tubes criblés sont désactivés par des bouchons de callose, un composé polysaccharidique qui se dépose à la surface des cribles pour les obturer de façon temporaire ou permanente (un système similaire de blocage a lieu au niveau des vaisseaux du xylème avec les thylles).

En plus des tubes criblés et des cellules compagnes, Le phloème comprend également des fibres de soutien. On peut citer comme exemple les fibres libériennes de la vigne ou de la tige du cannabis. Comme les fibres du xylème, les fibres libériennes ont été historiquement utilisés par l'homme pour réaliser des cordages, paniers et autres vêtements. Le phloème comporte également du parenchyme libérien, qui est soit vertical (allongé dans le même sens que les tubes criblés) ou horizontal (allongé perpendiculaire aux tubes criblés). Le parenchyme horizontal forme des rayons libériens bien visible sur coupes transversales, qui se situent d'ailleurs dans le prolongement des rayons ligneux du xylème (ils sont en effet issus des mêmes cellules cambiales).

Pour assurer leur croissance en longueur, et à la différence des plantes aquatiques qui sont en quelque sorte portées par la masse d'eau, les plantes aériennes ont besoin de structure de soutien (nous laisserons ici volontairement de côté le cas des plantes grimpantes, qui s'agrippent à leur support en utilisant différents organes, racines adventives chez le lierre, vrilles foliaires chez la vesce, etc.). Deux tissus particuliers sont dévolus à la fonction de soutien : le collenchyme et le sclérenchyme.

Les tissus de soutien

Hormis pour les plantes entièrement aquatiques, dont les organes sont soutenus par l'eau, les plantes parties à la conquête du milieu aérien ont rapidement eu besoin de développer des tissus de soutien pour pouvoir adopter différentes postures dressées. Si le xylème secondaire (bois) joue un rôle de soutien fondamental pour de nombreuses espèces, il existe également deux tissus de soutien et de protection complémentaires que l'on rencontre couramment au niveau des organes comme les tiges et les feuilles, y compris chez les plantes herbacées : le collenchyme d'une part et le sclérenchyme d'autre part.

Les collenchymes

Le collenchyme est un tissu végétal primaire de soutien caractérisé par des cellules dont les parois cellulosiques sont fortement épaissies. On distingue plusieurs types de collenchyme, selon que la cellulose s'est accumulée :

Les cellules du collenchyme restent vivantes, et conservent la possibilité d'échanger du matériel avec les cellules environnantes grâce à des ponctuations. Mise en place de manière généralement précoce, le collenchyme permet l'élongation des cellules, et il constitue donc le tissu de soutien par excellence des organes jeunes en croissance. Le collenchyme est presque toujours sous-épidermique, et on ne le rencontre pas dans les zones profondes des organes (il existe cependant une exception, lorsque des massifs superficiels de collenchyme sont rejetés vers l'intérieur suite à l'activité du cambium subéro-phellodermique et la production de périderme).

Collenchyme rond dans une aile de la tige de gaillet gratteron (Galium aparine) vue en coupe transversale, Etzold FCA (x25) L'image ci-dessus est annotée Collenchyme angulaire dans une tige de courge (Cucurbita) vue en coupe transversale, Etzold FCA (x40) L'image ci-dessus est annotée Collenchyme tangentiel dans un pétiole de sureau (Sambuscus nigra) vue en coupe transversale, Etzold FCA (x40) L'image ci-dessus est annotée

 

Le sclérenchyme

Le sclérenchyme est un tissu de soutien et de protection tardif et inextensible caractérisé par des cellules mortes dont les parois cellulaires se sont considérablement épaissies par des dépôts successifs de lignine. Les cellules du sclérenchyme prennent souvent la forme de fibres (corps cellulaires étirés, aux extrémités effilées). Comme avec les fibres ligneuses et libériennes, l'homme tire profit de certaines fibres du sclérenchyme (voir par exemple le cas du Phormium tenax).

A côté des massifs plus ou moins compact de fibres, le sclérenchyme peut également se présenter sous la forme de sclérites : ce terme désigne une cellule dont la paroi s'est recouverte d'un dépôt très épais et irrégulier de lignine. Les sclérites sont généralement disséminées dans des parenchymes, et on les rencontre par exemple dans le tégument des graines et la paroi des akènes, au niveau de l'endocarpe lignifié des noyaux de drupes, dispersés dans le parenchyme charnu des fruits (cellules de pierre de la poire).

Sclérenchyme périvasculaire dans un cladode de fragon petit-houx (Ruscus aculeatus) vue en coupe transversale, Etzold FCA (x40) L'image ci-dessus est annotée Une sclérite au niveau du parenchyme aérifère d'un pétiole d'une feuille de nénuphar (Nymphaea) vue en coupe transversale, Etzold FCA (x20) L'image ci-dessus est annotée Des sclérites (scléréides) prismatiques dans le tégument d'une graine de haricot (Phaseolus vulgaris) vue en coupe transversale, Etzold FCA (x40) L'image ci-dessus est annotée
 
Des sclérites (cellules de pierre) dans le parenchyme d'une poire (Pyrus Communis) vue en coupe transversale, Etzold FCA (x40) L'image ci-dessus est annotée Tige de bryone dioïque (Bryonia dioica), coupe longitudinale, fibres du sclérenchyme biseautées (x10) L'image ci-dessus est annotée  

 

Les tissus sécréteurs

Les plantes jouent un rôle considérable dans l'alimentation humaine ou animale. Elles représentent en effet des sources de sucres (glucides des fruits par exemple), de protéines (céréales) ou de lipides (huiles tirées de graines d'espèces oléagineuses). Mais l'une des caractéristiques du monde végétal est également d'être la source de milliers de molécules très variées, depuis des huiles essentielles employées en parfumerie jusqu'aux innombrables principes actifs qui servent de médicaments, et grâce auquel l'homme peut améliorer ou retrouver sa santé, ou au contraire éliminer un indésirable. Le véritable rôle de ces molécules pour la plante est souvent ignoré : selon les cas, il peut s'agir de simples déchets (mais qui se révèlent avoir une utilité à posteriori), ou un arsenal chimique défensif (les plantes étant immobiles, elles ne peuvent pas par définition fuir devant une menace, et elles doivent donc se protéger autrement).

Feuille de citronnier (Citrus), coupe transversale, glande à essence, Etzold FCA (x20) L'image ci-dessus est légendée Tige de Pin (Pinus), coupe transversale, canal résinifère, Etzold FCA (x40) L'image ci-dessus est annotée Limbe d'une feuille de Cannabis sativa, coupe transversale, trichome sécréteur glandulaire sessile, Wacker (x40) L'image ci-dessus est annotée

Les tissus capables de synthétiser des composés spécifiques sont regroupés sous le terme de tissus sécréteurs. Dans certains cas, ces tissus se présentent sous la forme de structures particulières, unicellulaires ou pluricellulaires. Dans cette catégorie, on trouve ainsi pêle-mêle :

Dans d'autres cas, les tissus sécréteurs ne forment pas de structures morphologiquement reconnaissables. Il s'agit alors simplement d'une cellule, ou d'un ensemble de cellules, intégrées à un tissu particulier, et qui sécrètent un ou plusieurs composés. Ces derniers peuvent rester dans le cytoplasme, ou s'accumuler dans la vacuole centrale. Comme exemple, on peut par exemple citer les cellules épidermiques des pétales de rose, ou les cellules qui fabriquent des alcaloïdes (comme celles dispersées dans la feuille d'Erythroxylum coca, source de la cocaïne).

L'endoderme

Parmi les tissus végétaux, l'endoderme représente un cas particulier. Par ce terme, on désigne une assise cellulaire continue que l'on rencontre autour du cylindre central des racines, et que l'on peut également retrouver parfois au niveau de tiges souterraines (rhizomes), des tiges immergées de plantes aquatiques, des tiges aériennes (comme chez la prêle) ou encore au niveau des aiguilles de conifères.

L'endoderme désigne la couche cellulaire la plus interne du parenchyme cortical, et dont le rôle principal est de faire obstacle au passage des fluides vers le cylindre central. Pour remplir sa fonction de contrôle du transport de matière entre la zone corticale externe et la zone centrale d'un organe donné, certaines faces bien spécifiques de la paroi des cellules de l'endoderme sont imperméabilisées par un dépôt de subérine.

Racine d'Iris (Iris), coupe transversale, endoderme avec cadres subérifiés de Caspary en fer à cheval, Safranine/fast green (x20) L'image ci-dessus est annotée Racine d'Iris (Iris), coupe transversale, endoderme avec cadres subérifiés de Caspary en fer à cheval. Notez la cellule de passage (au centre), dont les parois ne sont pas subérifiées et qui est située pile en face d'un pôle ligneux du xylème, Etzold FCA (x40) L'image ci-dessus est annotée Rhizome (tige souterraine) de fougère (Polypodium vulgare), coupe transversale, détail d'une protostèle vasculaire avec endoderme, péricycle, phloème et xylème, parenchyme cortical, Etzold FCA (x10) L'image ci-dessus est légendée

Dans un organe végétal, l'eau et les solutés qu'elle transporte peut circuler en passant soit entre les cellules (voie apoplasmique), soit au travers des cellules (voie symplasmique, qui est alors hautement sélective). Chez les dicotylédones, les parois radiales et transversales des cellules de l'endoderme sont subérifiées (bandes ou cadres de Caspary). Le passage entre les parois est donc rendu impossible, et pour migrer du cortex vers le cylindre central, la matière est donc forcée de traverser les cellules endodermiques au niveau des parois tangentielles. Un éventuel reflux de fluides depuis le cylindre central vers le cortex est également empêché.

Chez les monocotylédones, l'endoderme présente des épaississements subérifiés de Caspary en U aussi esthétiques que caractéristiques : toutes les faces des cellules endodermiques sont subérifiées et donc imperméabilisées, à l'exception de la face externe. La voie symplasmique est donc également totalement bloquée, sauf au niveau de cellules particulières de l'endoderme, dites cellules de passage, qui sont généralement situées en face des faisceaux cribro-vasculaires du cylindre central.

Chez les plantes, l'endoderme jouerait également le rôle de pompe refoulante pour l'eau au printemps. En effet, comme nous l'avons vu précédemment, l'un des moteurs de la circulation de la sève brute (eau et sels minéraux) dans les vaisseaux du xylème n'est autre que l'évapotranspiration, c'est à dire la perte d'eau sous forme de vapeur principalement au niveau des stomates épidermiques des feuilles (lorsque ceux-ci sont ouverts), qui créé une aspiration. Cet appel d'eau est couplé à un autre phénomène, la pression racinaire. Au printemps, les arbres caducifoliés (qui perdent leurs feuilles en automne) n'ont pas encore retrouvé des feuilles, et ces dernières ne peuvent jouer le rôle de pompe aspirante. C'est l'endoderme qui suppléerait à ce manque en jouant le rôle d'une pompe racinaire.

Les méristèmes

Par rapport au animaux, les plantes possèdent une fascinante capacité d'auto régénération. En effet, il suffit de planter en terre un fragment de tige ou un morceau de feuille d'une plante pour constater avec stupéfaction que des racines se forment sur certaines parties de l'organe choisi. Plus incroyable encore, en patientant assez longtemps, et à condition de fournir eau et lumière, on peut être témoin d'un véritable tour de force : la feuille ou la tige sont à l'origine d'une nouvelle plante entière.

Les plantes possèdent de manière permanente dans certaines régions des cellules non différenciées, que l'on appelle méristématiques (ou cellules initiales), et qui peuvent se multiplier à volonté, pour former des cellules qui se différencieront ensuite en épidermes, éléments conducteurs ou encore cellules sécrétrices. De plus, certaines cellules déjà différenciées (qui ont donc choisies leur voie) peuvent dans certaines conditions redevenir méristématiques. Une fois cette seconde jeunesse retrouvée, elles sont capables de reformer un nouvel organe (racines adventives par exemple), voire une plante entière. Cette potentialité ininterrompue de croissance est l'un avantage les plus importants des plantes. Étant par définition immobiles, fixées pour le meilleur ou pour le pire dans un environnement qui peut rapidement se montrer défavorable, les plantes possèdent en contrepartie la possibilité de se régénérer, de manière à pouvoir faire face aux nombreux aléas auxquels elles sont, théoriquement ou pratiquement, exposées.

Racine de jacinthe (Hyacinthus), coupe longitudinale, montrant coiffe, centre quiescent, cellules méristématiques du méristème apical racinaire en division (x10) L'image ci-dessus est annotée Tige de coléus (Plectranthus), coupe longitudinale, méristème apical caulinaire, primordium foliaire et axillaire, Safranine/fast green (x4) L'image ci-dessus est annotée Tige de coléus (Plectranthus), coupe longitudinale, détail du méristème apical caulinaire, cellules en mitose, Safranine/fast green (x100) L'image ci-dessus est annotée
   
  Jeune embryon d'une graine de Cardamine (Cardamine), coupe longitudinale médiane. Contenu et protégé par le tégument de la graine, l'embryon préfigure déjà la plante adulte. Il possède en effet une jeune racine (la radicule), une jeune tige (la tigelle) et une ou deux feuilles embryonnaires spéciales, les cotylédons. Les méristèmes primaires apicaux caulinaire et racinaire sont eux aussi déjà là. Etzold FCA (x20) L'image ci-dessus est annotée  

On appelle méristème un tissu constitué de plusieurs cellules (plus rarement une seule) demeurées à l'état embryonnaire et qui, par division répétée dans des directions bien spécifiques puis différentiation, peut donner naissance à la totalité des tissus spécialisées d'une plante. L'étude ultrastructurale des cellules méristématiques, principalement par microscopie électronique à transmission mais aussi dans une moindre mesure par microscopie photonique, montre qu'elles partagent toutes certaines caractéristiques. Il s'agit de petites cellules isodiamétriques, avec une paroi cellulaire pecto-cellulosique fine, un cytoplasme dense riche en ribosomes (et éventuellement en réticulum endoplasmique rugueux), avec également de nombreuses petites vacuoles et des pro-plastes (plastes peu différenciés), un large appareil de Golgi et enfin un volumineux noyau.

Les méristèmes sont classés en deux grands types : les primaires et les secondaires.

Les méristèmes fondamentaux primaires, d'origine embryonnaire, sont situés à l'apex des tiges (méristème caulinaire apical), à la pointe des racines (méristème racinaire) ainsi qu'à la base des feuilles. Ils forment les tissus primaires qui vont constituer la structure primaire d'une plante donnée, et sont responsables de son allongement en longueur. Les méristèmes primaires sont déjà présents au niveau de l'embryon d'une graine. De la périphérie vers le centre, on trouve ainsi :

En plus des méristèmes apicaux caulinaires et racinaires, certaines plantes (Poacées notamment) possèdent au niveau de leur tiges des méristèmes intercalaires. Ces derniers expliquent les vitesses de croissance élevées comme celles qui caractérisent les tiges de bambous, et la capacité que possèdent de nombreuses graminées à pouvoir se redresser après que leurs tiges aient été couchées par le passage de l'homme ou de machines.

Les méristèmes secondaires, phellogène (subéro-phellodermique) et cambium (libéro-ligneux), apparaissent après les méristèmes primaires. Ces deux assises génératrices assurent la croissance en épaisseur de la plante et génèrent, par des divisions le plus souvent périclines (en suivant le plan tangentiel), les tissus secondaires qui ensemble forment la structure secondaire. Ces cambiums secondaires sont exclusivement histogènes (formation de nouveaux tissus, mais pas de nouveaux organes). Selon l'espèce, les cambiums secondaires peuvent être continus ou discontinus. Les formations secondaires n'existent que chez les gymnospermes, les angiospermes dicotylédones (ils étaient également présents chez les fougères arborescentes fossiles, mais ils ont disparu chez nos ptéridophytes actuels).

Chez de nombreuses espèces ligneuses de nos régions tempérées, la mise en place des méristèmes secondaires a lieu dès la première année, souvent au mois d'août (aoûtement).

Quelques images illustrant mon laboratoire, ainsi que les techniques histologiques employées pour réaliser les préparations microscopiques présentées dans sur galerie sont disponibles ici. Toutes les photographies de cette page sont sous copyright (© Philippe Labrot/Nirgal.net, tous droits réservés). Me contacter si vous êtes intéressé par une utilisation, commerciale ou non, de certains clichés.

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