Cône de pin femelle (Pinus), coupe longitudinale (x4)

 

 

Chez le pin (Pinus), les cônes femelles apparaissent au début du printemps à l'extrémité de certains rameaux sous la forme de petits strobiles charnus joliment colorés en rouge. Chaque cône est formé d'un axe central trapu au niveau duquel s'insèrent des écailles qui portent chacune deux ovules situés près de l'axe du cône, et qui sont elles-mêmes axillées par une feuille spécialisée, une bractée scarieuse. Un ensemble bractée/écaille avec ses ovules constitue une fleur, et le cône de pin est donc par définition une inflorescence.

La structure bractée/écaille peut également être appelée mégasporophylle, car ce sont des feuilles qui portent des sporanges, représentés ici par les ovules. Les deux ovules portées par chaque écaille sont droits (orthotropes). Comme ceux des angiospermes, ils possèdent un tégument percé d'une ouverture qui permettra le passage d'un grain de pollen, le micropyle, et un tissu charnu, le nucelle, qui est interprété comme étant un mégasporange, porteur d'une seule cellule mère de spores (mégasporocyte). Par contre, le funicule est absent, puisque l'ovaire et sa paroi n'existent pas chez les gymnospermes.

La pollinisation des cônes femelles, qui sont alors ouverts, a lieu dès le printemps de la première année. Les grains de pollen amenés par le vent qui ont la chance de pénétrer entre les écailles sont capturés par une gouttelette d'une substance visqueuse émise par le nucelle au niveau du micropyle. La simple rétraction du liquide placera ensuite les grains de pollen en contact avec le nucelle. La fécondation n'aura cependant lieu en moyenne que 15 mois plus tard. Effectivement, une fois la pollinisation effectuée, le cône femelle va refermer ses écailles (le micropyle, désormais inutile, se bouche également), emprisonnant ainsi les grains de pollen qui se trouvent piégés dans une chambre pollinique, au contact direct du nucelle donc. Les grains de pollen commencent à générer un tube pollinique, mais celui-ci ne va pas aller pour l'instant bien loin.

Pendant ce temps, dans le nucelle des ovules, la cellule sporogène (la mégasporocyte) va subir une méiose, ce qui aboutira à la formation d'une tétrade linéaire. Parmi les quatre spores haploïdes ainsi formées et rangées en file indienne, seule celle située à l'opposé du micropyle, dans les profondeurs du nucelle, va subsister. Les trois autres spores vont simplement dégénérer et disparaître. La mégaspore survivante va alors "germer" pour donner naissance à l'équivalent d'un prothalle femelle. Son noyau va se diviser plusieurs fois, tandis que le volume de son cytoplasme va grandir. L'ensemble donnera une masse cœnocytique possédant quelques dizaines de noyaux : c'est l'endosperme, qui représente chez les gymnospermes le gamétophyte femelle haploïde.

À ce stade, les choses vont s'arrêter pour l'hiver, et la subtile mécanique de la reproduction sexuée du pin ne reprendra qu'au printemps suivant. Au début de la seconde année, l'endosperme va perdre sa nature cœnocytique, et acquérir une structure cellulaire. Le tissu va occuper la majeure partie de l'ovule, qui peut alors atteindre une taille conséquente (jusqu'à 1 cm chez certaines espèces). Au sein de l'endosperme (du prothalle donc, c'est à dire du gamétophyte femelle), les gamétanges femelles vont apparaître : des cellules vont se différentier pour donner naissance à deux ou trois archégones. Ceux-ci sont formés par un col très court, tassé sur lui-même, qui conduit presque immédiatement à un unique gamète femelle, un volumineux oosphère (100 microns de diamètre environ).

Pour les grains de pollen, qui ont donc passés l'hiver calfeutrés à l'intérieur du cône femelle, il est temps de reprendre vigueur. Le tube pollinique va recommencer à grandir, tandis que la cellule spermatogène va se diviser pour donner deux noyaux nus, qui vont représenter les gamètes mâles. Ceux-ci seront conduits par le tube pollinique au travers du col de l'archégone (mécanisme de siphonogamie), et l'un des noyaux s'unira avec l'oosphère pour former un zygote, qui se développera ensuite en proembryon puis en embryon. Au sein d'un même ovule, plusieurs oosphères peuvent être fécondés, mais dans la très grande majorité des cas seul l'un d'eux sera autorisé à se développer pleinement.

Durant sa croissance, l'embryon va se nourrir au détriment du tissu haploïde du gamétophyte, l'endosperme, qui est riche en substances de réserve. Une petite plantule, totalement incluse dans l'endosperme, finira par apparaître. Celle-ci possédera 6 petites feuilles modifiées, les cotylédons, au niveau desquels des réserves protéiques et lipidiques s'accumuleront. Durant le stade final de formation de la graine nue (qui n'est donc pas incluse dans un fruit, étant donné encore une fois qu'il n'y a pas d'ovaire chez les gymnospermes), le tégument va se lignifier, tandis que l'endosperme et l'embryon vont se déshydrater. Les graines vont ensuite devoir patienter dans le cône femelle en vie ralentie jusqu'au printemps suivant : c'est effectivement seulement à cette période que le cône femelle va de nouveau s'ouvrir pour se désarticuler définitivement, et confier ses graines au vent (anémochorie). Le mégasporophylle, toujours attaché à la graine, favorisera leur dispersion en jouant le rôle d'une aile miniature.

Au vu de ce qui précède, on comprend que les petites graines ailées que l'on peut ramasser au pied de certains conifères résultent en fait d'une histoire très complexe, constituée de la succession, sur de longues périodes de temps, de phénomènes et d'événements invisibles à l'œil nu, mais néanmoins remarquablement fascinants et subtils.

 

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