Tige âgée d'aristoloche (Aristolochia macrophylla), coupe transversale, détail d'une lenticelle (x7)

 

 

Cette coupe réalisée sur une tige déjà âgée d'Aristoloche a été colorée par de l'Etzold FCA : les cellules à parois lignifiées sont colorées en rouge/rose par la fuchsine basique, celles à parois subérifiées apparaissent en jaune/brun grâce à la chrysoïdine, et celles dont les parois sont restées cellulosiques sont teintées en bleu clair par le bleu astral.

La préparation est ici centrée sur une structure commune mais néanmoins remarquable que l'on retrouve très souvent sur des organes dotées de structures secondaires (tiges et racines). Pour pouvoir grandir et augmenter leur diamètre, les plantes font fonctionner deux assises génératrices, formées de petites cellules à parois fines qui ne cessent de se diviser selon des directions bien précises : le cambium libéro-ligneux (qui produit les éléments secondaires conducteurs de la sève brute et de la sève élaborée), et le cambium subéro-phellodermique. C'est ce dernier qui va nous intéresser ici.

Situé vers la périphérie des tiges (mais aussi de racines), le cambium subéro-phellodermique est responsable de la production, vers l'intérieur d'un tissu parenchymateux nommé phelloderme, et vers l'extérieur de liège, qui peut s'accumuler sur des épaisseurs parfois considérables (comme le montre par exemple le chêne liège, dont on récolte l'écorce). Dans le liège, les cellules sécrètent au niveau de leur paroi de la subérine, une substance hydrophobe imperméable, dans une quantité telle que la cellule, asphyxiée, finit par mourir. D'elle il ne reste plus que la paroi, qui entoure un espace (lumière cellulaire) rempli d'air, ou obstrué par des composés vivement colorés, bouchons de résine ou de composés tannins.

Si le liège est une redoutable barrière contre de nombreux sources d'agression (hautes et basses températures, substances chimiques, agents pathogènes de diverse nature, etc.), il est également par nature imperméable à l'eau et aux gaz. Si la plante trouve ses ressources hydriques par les racines, la captation de l'air indispensable à sa survie devient problématique sous une couche isolante de liège. C'est là qu'interviennent les lenticelles, qui ne sont ni plus ni moins que des ouvertures ménagées par la plante pour pouvoir respirer malgré la présence du liège.

Sorte d'éclatement d'aspect peu engageant d'où échappent des particules brunâtres, prenant à l'extérieur l'apparence de lentilles (d'où leur nom), les lenticelles sont pourtant des structures remarquablement bien conçues. Elles se trouvent généralement à l'emplacement d'anciens stomates. Dans ces secteurs, le phellogène (autre nom de l'assise subéro-phellodermique) produit non seulement du liège, mais également des amas de cellules parenchymateuses (le tissu de remplissage), qui sont plus ou moins jointives. La prolifération de ces amas va finir par distordre et faire éclater les couches isolantes de liège, mettant ainsi les tissus vivants périphériques en contact avec l'extérieur. Le passage des gaz est rendu d'autant plus facile que le tissu de remplissage possède une faible cohérence, et se désagrège facilement en s'effritant. Au niveau des lenticelles, qui peuvent être vues comme des blessures naturelles béantes que la plante s'inflige volontairement à elle-même, les échanges gazeux sont donc à nouveau rendus possibles.

Attention toutefois, à l'inverse des stomates, qui peuvent s'ouvrir ou se fermer à volonté grâce à la déformation des deux cellules de garde, les lenticelles constituent des ouvertures non réglables. Cependant, à l'approche de l'automne ou de l'hiver, le phellogène peut produire un bouchon de liège, qui obstruera temporairement le passage. Au retour du printemps, ce dernier sera déchiré par la croissance d'un nouveau bourrelet parenchymateux à partir du phellogène.

 

Tige âgée d'aristoloche (aristolochia macrophylla), coupe transversale, détail d'une lenticelle, Etzold FCA (x5) Tige de sureau noir (Sambuscus nigra), coupe transversale, formation d'une lenticelle, Wacker ASIM III (x20) Tige de sureau noir (Sambuscus nigra), coupe transversale, détail d'une lenticelle, Wacker ASIM III (x20)
   
Tige de tilleul (Tilia) âgée de 3 ans, coupe transversale, détail d'une lenticelle (x20)    

 

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