The Last Day On Mars

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The Last Day on Mars
Commander "The Last Day On Mars" via Amazon

Note : 3 etoiles
Réalisateur :
Ruairi Robinson
Editeur
: TF1 Vidéo
Sortie : septembre 2013
Durée : 102 minutes

Le titre ne laissait déjà rien augurer de bon, que ce soit pour le spectateur, ou pour l'équipage qui semble avoir été embarqué de force dans une galère indicible. S'il y a bien une chose de sûr, c'est que The Last Day on Mars n'a pas gagné les faveurs des critiques. Reste que le film n'est pas aussi mauvais que ce que l'on pourrait penser de prime abord, et qu'il est même très agréable à regarder pour deux raisons : le soin apporté aux effets spéciaux, qui restitue à merveille les paysages et l'atmosphère de Mars (de jour comme de nuit), et une thématique plus subtile, qui est celle de l'impérieuse nécessité, pour une mission habitée, de devoir sélectionner des astronomes dont la stabilité émotionnelle et psychique ne souffrira d'aucun doute.

Naviguant entre la science-fiction et l'horreur, le scénario du film (adapté d'une nouvelle intitulée "The Animator") a un sérieux goût de déjà-vu. Alors qu'ils sont sur le point de quitter Mars pour retourner vers la Terre, après 6 mois de présence sur la planète rouge, un petit groupe d'hommes et de femmes découvre in-extremis ce qu'ils étaient désespérément venu chercher, sans être pour l'instant parvenu à le trouver : une forme de vie martienne. Hélas pour eux, le microbe tant espéré se révèle pathogène, et infecte un à un les membres d'équipage, qui se transforment en zombies à la peau noirâtre.

Le thème de la contamination martienne est devenu tellement banal qu'il en est presque ennuyeux. Presque tous les films ayant choisi Mars comme lieu d'action semblent se plier à cette règle implicite : faire de la planète rouge un environnement certes inhospitalier (et en ce sens conforme à la réalité), mais aussi toujours habité par une forme de vie hostile et primale, dont l'unique but semble être d'attendre depuis des milliards d'années qu'un humain pose enfin le pied sur le sol pour pouvoir se nourrir, ou extérioriser les pulsions les plus agressives qui soit. Inutile de dire que la NASA et les autres agences spatiales vont devoir fortement travailler leurs communications lorsqu'une mission de retour d'échantillons martiens aura lieu dans la prochaine décennie !

Mais retournons sur Mars, là où le film commence, à l'intérieur d'une base spatiale aseptisée et de fort belle allure, pour faire connaissance avec nos membres d'équipage, dont le sort est toujours un point clé des films d'horreur : qui disparaîtra en premier, et qui survivra à la fin ? Dès les premières minutes, il apparaît évident que la tension qui existe entre les différentes personnes est à son comble, et aucun ne cache plus ses ressentiments, ses frayeurs et sa morosité. Le commandant Charles Brunel n'a manifestement plus aucun pouvoir sur ses troupes. L'un des chercheurs (Marko Petrovic) n'hésite pas à mentir pour pouvoir ressortir de la base malgré l'heure tardive, tandis que l'un des trois membres féminins (Kim Aldrich, qui a des petits airs de Ripley), individualiste et en conflit avec l'autorité, semble être atteinte d'une sorte d'hystérie, caractérisée par des bouffées de colère et une propension constante et maniaque à appeler aux respects des règles et procédures. La base elle-même, avec son lot de défaillances techniques, est à l'image de ceux qui y habitent. A peine revenu d'une sortie en rover, le technicien Vincent Campbell doit se faufiler dans un conduit étroit, à peine éclairé par une lumière rougeâtre, pour réparer un système de bord. La Terre, lointaine et inaccessible, ne sera évoquée qu'au travers de ses prairies vertes et de son ciel bleu. Le film évoque ici la possibilité qu'il n'y ait peut-être rien à faire sur Mars, et que quitter le globe terrestre a été une monumentale erreur. C'est peut-être d'ailleurs pour cela que tous les films traitant de la planète rouge sont des films catastrophes.

Assis au bord d'une table à assister aux échanges d'invectives, le psychologue de la mission (Robert Irwin), casquette vissée sur la tête et un mug à la main, semble regarder de haut ses ouailles s'agiter dans leur bocal d'acier. Lorsque Rebecca Lane rappelle que les astronautes de l'époque Apollo sont tous revenus changés de la Lune, Irwin lui répond que les gens ne changent pas vraiment, mais qu'il suffit de les mettre sous pression pour qu'ils révèlent leur véritable nature, une nature qui a toujours été là. Bien entendu, le stress, déjà très élevé après six mois de mission, ne va pas cesser d'augmenter, précipitant nos astronautes dans une véritable descente aux enfers. Au film du temps, chacun d'eux va finir par adopter des comportements différents et inattendus, parfois pour le meilleur, souvent pour le pire.

Un peu à l'image du psychologue Searle du magnifique film de science-fiction Sunshine, qui n'est pas aussi sain que sa fonction pouvait le laisser entendre, Irwin va devoir faire face lui aussi à ses propres démons. Mais ce n'est pas le personnage qui illustre le mieux l'importance de sélectionner des gens qui ont exploré leur inconscient, et qui ont réglé leurs comptes avec ce qui s'agite dans les profondeurs insondables de leur psyché. Le technicien Vincent Campbell, qui semble avoir été quelque peu éprouvé durant le long voyage entre la Terre et Mars et que l'on suit tout au long du film, le dira lui-même très bien : "ils sont censés nous tester ... et refuser des gens comme moi !" Mars symbolisant la colère, il est d'ailleurs possible de voir la transformation des membres d'équipage en zombies comme le retour d'affects et de pulsions trop longtemps refoulées. Il est connu que les astronautes voient d'un œil mauvais toutes les analyses médicales auxquels ils doivent se soumettre, car la plus petite anomalie dans un bilan sanguin ou un examen médical peut les forcer à rester au sol, et à être éliminé d'une mission spatiale. Or, la santé physique et la physiologie ne sont pas les seuls éléments qui doivent être vérifiés. La santé mentale est également fondamentale, comme le démontre l'étude des équipages contraint de rester de nombreux mois dans des environnements confinés et dangereux, que ce soit une base d'hivernage en Antarctique ou un sous-marin militaire. Si The Last Day On Mars a un intérêt, c'est celui d'éclairer un tout petit peu ce sujet tabou.

L'autre attrait du film touche aux effets spéciaux. Visuellement, c'est magnifique, certaines scènes étant à couper le souffle. Un soin tout particulier a été apporté aux vaisseaux orbitaux, aux combinaisons, à la base spatiale, aux véhicules et aux paysages martiens, et sur ce point, The Last Day On Mars rappelle Mission to Mars de Brian de Palma. Les rovers, qui permettent à l'équipage de se déplacer, sont bien conçus, et d'une manière générale, les scènes extérieures (tournées en Jordanie) sont grandioses, que ce soit dans la clarté du soleil levant, au milieu d'une tempête de poussière, ou au cœur de la nuit la plus noire. Certes, le film contient son lot d'incohérences scientifiques ou techniques, même si ces dernières sont moins choquantes que dans Planète Rouge. Ainsi, comme dans de nombreux films, il suffit encore et toujours de déposer une goutte de sang sur une lame de verre (glissée ensuite en un tour de main sur la platine d'un microscope) pour avoir des analyses détaillées quelques secondes plus tard. De la même manière, la mystérieuse forme de vie martienne est identifiée en quelques minutes sur la base de simples images.

Pour le reste, The Last Day On Mars n'apporte pas grand chose de novateur. L'idée qui consiste à trimballer les membres d'équipage entre la base, l'extérieur et les rovers aurait sans doute méritée d'être développée. Ainsi, à un moment, le film laissait espérer que les rescapées aient à trouver refuge à l'extérieur, avec scaphandres et réserves d'air limitées, abandonnant les couloirs confinés de la base, occupée à ce moment-là par des zombies bien décidés à s'installer. Hélas, les humains sont vite de retour dans un autre module. L'ensemble semble en fait trop marqué par des emprunts obligés à certains chefs d'œuvre du genre, comme Alien auquel on pense très rapidement. Ainsi, nous avons droit à la scène classique et anxiogène de progression dans un tunnel fermé aux deux extrémités, et qui permet de communiquer d'un module à l'autre. On pourra également citer pêle-mêle l'influence du classique The Thing de John Carpenter, de l'affreux Ghosts of Mars (toujours Carpenter, mais plus du tout inspiré !), ou de Mission to Mars. La conclusion, moins conventionnelle et plus ouverte que prévue, parvient néanmoins à faire travailler l'imaginaire du spectateur, certains éléments du scénario demeurant sans réponse.

The Last Day On Mars n'est finalement pas le long métrage médiocre annoncé par les critiques, et si on peut lui reprocher un manque d'ampleur et de prise de risque au niveau du scénario, trop convenu, la réalisation, le rythme et l'implication des acteurs permettent, à condition d'être indulgent, de passer un bon moment. Certes, les fans de films de zombie ne trouveront rien à se mettre sous la dent (les scènes angoissantes ou sanglantes, qui à mon avis n'apportent souvent rien, sont ici heureusement peu nombreuses), mais vu sous l'éclairage de la science-fiction en général, et du déroulement d'une mission habitée en particulier, The Last Day On Mars apporte une toute petite brique à l'édifice. Et c'est déjà mieux que rien.

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